« (...) Nous sommes venus ici pour marcher à la suite du Pape Benoît XVI qui encourage et soutient un nouveau mouvement en faveur de la liturgie et de sa célébration correcte, tant extérieure qu’intérieure. (1) Dans l’Exhortation apostolique « Sacramentum Caritatis », le Saint Père nous a rappelé que la réforme liturgique voulue par le Concile contient des richesses qui n’ont pas encore explorées. (2) La valorisation de la liturgie a été oubliée - ou n’est restée que superficielle - parce que la culture laïque fortement marqué par le relativisme, le matérialisme et l'individualisme, a également affecté la liturgie latine, touchant en particulier son caractère sacré et sa dimension catholique. Voilà pourquoi on a assisté au développement d’un conflit - en grande partie d’ordre émotionnel - entre les « innovateurs » et les « conservateurs ». Pour dépasser de façon raisonnable ce conflit, il faudrait reprendre le Mémoire sur la réforme liturgique (3) rédigé en 1949 par le Pape Pie XII et qui, déjà bien avant le concile Vatican II indiquait qu’une restauration de la liturgie était devenue nécessaire. Dans ce Mémoire étaient indiqués les principes fondamentaux d’une telle restauration et le programme pour sa mise en œuvre pratique. On trouve aussi les raisons - de cette époque - poussant à engager une réforme liturgique : l’état de la liturgie et des sciences liturgiques, la situation de la liturgie dans le monde, la disposition dans laquelle se trouve le clergé, les promesses et les initiatives qui devront être prises par le Saint-Siège pour une réforme liturgique définitive. C’est à la lumière de ces enseignements que nous devons relire la Constitution « Sacrosanctum Concilium » et en dégager certains points fondamentaux : la nature de la liturgie et son importance dans la vie de l’Eglise, la formation liturgique du clergé - à partir de la formation reçue dans les séminaires - ainsi que celle des fidèles, la réforme liturgique et son impact sur la spiritualité, et enfin les critères permettant de mener cette réforme à son terme.
Pour distinguer la « réforme de la liturgie » des « déformations de la liturgie » conduisant à ces situations intolérables dénoncées par le Pape Benoît XVI (4), il devrait être suffisant de voir si deux critères essentiels sont observés dans les célébrations actuelles : « probe servata eorum [rituum] substantia » et « restituantur vero ad pristinam sanctorum Patrum normam » (5), (la conservation fidèle de la substance des rites dans le respect de ce qui a été reçu des Pères.) Il faut aussi tenir compte des pressions subies par les responsables de la liturgie quand il s’est agit de mettre la réforme en œuvre : cette réalité a eu des conséquences sur l’application de la réforme en introduisant un esprit critique dirigé vers le Siège apostolique, un esprit rationaliste qui ne tenait plus compte des besoins d’une piété authentique... Le fait que les « liturgistes » n’étaient pas souvent de bons théologiens a fait qu’on a perdu de vue que les gestes et les paroles de la liturgie expriment des réalités théologiques. Du fait que la théologie était devenu l’objet de nombreuses discussions, les idées les plus sujettes à caution sont tombées sur les formules liturgiques et les rites avec une conséquence très grave : alors que les discussions auraient dû demeurer dans la sphère des spécialistes, elles sont devenue l’objet des débats s’élevant chez les simples fidèles. Cette réalité trouve un écho dans la Lettre apostolique « Vicesimus Quintus Annus » de Jean-Paul II, publiée en 1988, où il est questions d’ « applications erronées » de la réforme voulue par Vatican II (6).
Un autre point important qu’il faut souligner est le fait que la liturgie « de Paul VI » a été désacralisée par l’introductions d’expériences et d’usages faisant que ce qui avait été considéré comme sacré avant le Concile ne l’était plus après. (7) L’amour pour ce qui avait été transmis jusqu’ici s’est changé en un principe selon lequel chacun s’est cru autorisé à faire ce qu’il voulait comme il voulait. A l’occasion de la publication du Motu proprio « Summorum Pontificum » certains ont continué à soutenir que les deux formes de l’unique liturgie romaine étaient incompatibles dans la mesure où elles véhiculaient deux ecclésiologies différentes. Le Pape Benoît XVI, au contraire, a clairement montré que la coexistence des deux Missels romains était un moyen de créer le lien permettant de guider la juste compréhension de la Constitution « Sacrosanctum Concilium ». Il est important de rappeler ici les paroles du Pape Benoît XVI sur la réforme liturgique : « Concrètement, il s’agit de lire les changements voulus par le Concile à l’intérieur de l’unité qui caractérise le développement historique du rite lui-même, sans introduire de ruptures artificielles. » (8) En nous basant sur cette réalité de l’unité organique de la sainte Liturgie, en particulier après la publication de « Universae Ecclesiae » l’an dernier, nous devons tous, en particulier dans les instituts et les chaires de la liturgie, dans les séminaires et les facultés, encourager une discussion honnête afin d'encourager une discussion honnête et persévérante permettant de montrer qu’il doit y avoir un enrichissement mutuel entre la forme « ordinaire » et la forme « extraordinaire » du rite de la messe qui est devenu un sujet sur lequel le Saint-Père travaille avec persévérance. Par dessus tout, nos églises et toutes nos chapelles doivent toutes redevenir des lieux où la Liturgie sacrée est célébrée d’une manière exemplaire ; car la Liturgie est l’œuvre de Dieu qui nous est confiée pour être la manifestation la plus haute et la plus parfaite de sa sainte Eglise. (...) »
NOTES.
(1) Cf. Joseph Ratzinger, Teologia della liturgia. La fondazione sacramentale dell’esistenza cristiana [Opera omnia, Vol. XI], Città del Vaticano : Libreria Editrice Vaticana, 201, p. 26.
(2) Cf. « Rerum conditor Deus, qui legem laboris humano generi statuisti… » Missale Romanum ex decreto Ss. Concilii Tridentini restitutum Summorum Pontificum cura recognitum, Editio Typica 1962 [Missale Romanum 1962], ed. Manlio Sodi e Alessandro Toniolo, Città del Vaticano : Libreria Editrice Vaticana, 2007, p. 600, « Oratio ».
(3) Cf. Carlo Braga, C.M., ed., La riforma liturgica di Pio XII : Documenti, I. La « Memoria sulla riforma liturgica », Roma : Centro Liturgico Vincenziano, 2003.
(4) Benedictus PP. XVI, Epistula « Ad Episcopos Catholicae Ecclesiae Ritus Romani », die 7 Iulii 2007, Acta Apostolicae Sedis [AAS] 99 (2007), p. 796.
(5) Sacrosanctum Concilium Oecumenicum Vaticanum II, Constitutio « Sacrosanctum Concilium », « De Sacra Liturgia », AAS 56 (1964), p. 114, n. 50. Versione italiana : Enchiridion Vaticanum, Vol. 1, p. 51, n. 87.
(6) « [u]sus vitiosi ». Ioannes Paulus PP. II, Litterae apostolicae Vicesimus quintus annus, « Quinto iam lustro expleto conciliari ab promulgata de Sacra Liturgia Constitutione Sacrosanctum Concilium », 4 Novembris 1988, AAS 81 (1989), p. 910, c, n. 13. Versione italiana : Enchiridion Vaticanum, Vol. 11, p. 999, n. 1586.
(7) Cf. « Resistite fortes in fide », 29 giugno 1972, Insegnamenti di Paolo VI, Vol. 10 (1972), Città del Vaticano : Tipografia Poliglotta Vaticana, 1973, pp. 705-708.
(8) « Agitur reapse de immutationibus percipiendis, quas intra unitatem voluit Concilium, quae historicum ipsius ritus progressum, absque inductis facticiis fractionibus, designat ». Benedictus PP. XVI, Adhortatio Apostolica Post-Synodalis Sacramentum caritatis, « De Eucharistia vitae missionisque Ecclesiae fonte et culmine », die 22 Februarii 2007, AAS 99 (2007), p. 107, n. 3. Versione italiana : Enchiridion Vaticanum, Vol. 24, p. 91, n. 107.