Ceux qui utilisent sans cesse l'expression "messe traditionnelle" pour désigner la "forme extraordinaire" du rite romain en arrivent à semer (volontairement ?) la confusion dans l'esprit des fidèles et à trahir aussi bien la lettre que l'esprit du Motu proprio Summorum Pontificum de Benoît XVI. Le moins qu'on puisse dire, c'est que cela n'arrange pas les choses... Est-il juste et légitime de qualifier la messe célébrée selon la forme extraordinaire du rite romain de "messe traditionnelle" ? Selon l'enseignement de l'Eglise - et des Pontifes romains - la "forme extraordinaire" du rite romain n'est pas davantage "traditionnelle" que la forme actuelle dite "ordinaire". De ce fait, il ne revient pas aux fidèles de déterminer si telle forme serait plus ou moins "traditionnelle" que telle autre forme. En réalité, c'est l'usage liturgique pris dans sa globalité de son histoire qui est, de façon incontestable, "traditionnel". Car comme l'enseigne Benoît XVI, « l'histoire de la liturgie est faite de croissance et de progrès, jamais de rupture » (Cf. Lettre aux évêques précisant le sens du Motu proprio Summorum pontificum). Ainsi, désignant ceux qui préfèrent la forme "extraordinaire" du rite romain, Benoît XVI parle des "fidèles liés à l'ancienne tradition liturgique latine" et non des "fidèles liés à la tradition liturgique latine". Cette distinction mérite d'être ici soulignée. Par ailleurs, dans l'article 1 de la Présentation générale du Missel romain - Missel dont se sert tous les jours Benoît XVI lorsqu'il célèbre l'Eucharistie - on lit que « les règles d'aujourd'hui qui ont été prescrites en s'appuyant sur la volonté du IIe concile oecuménique du Vatican et le nouveau Missel que l'Eglise de rite romain utilisera désormais pour célébrer la messe prouvent cette attention de l'Eglise, sa foi et son amour inchangés envers ce plus grand des mystères qu'est l'Eucharistie, et témoignent de sa tradition continue et ininterrompue, quelles que soient les nouveautés qui y ont été introduites ».
Il est donc clair que la liturgie célébrée avec le Missel romain de 1962 dit "du Bx Jean XXIII" n'est pas considérée comme plus "traditionnelle" par l'Eglise que la liturgie célébrée avec le Missel romain de 2002 dit "de Paul VI". Rappelons enfin que le Cardinal Ratzinger, au cours d'une conférence donnée à l'abbaye de Fontgombault, avait souligné combien les différences entre les deux formes du rite romain étaient minimes... quand la forme ordinaire est respectée, bien sûr, ce qui est rarement le cas dans nos paroisses ! Est-ce honnête, quand on se veut fidèle aux enseignements du Souverain Pontife, d'employer, pour désigner la forme extraordinaire du rite romain, une terminologie - ici le mot "traditionnel" - qui déforme l'enseignement magistériel et risque d'abuser les fidèles ?
Pro Liturgia