5 janvier 2010 2 05 /01 /janvier /2010 09:12

Mgr Nicola Bux, qui enseigne la liturgie et la théologie sacramentaire à l'Institut de théologie de Bari et qui a été nommé par Benoît XVI Consulteur au Bureau des cérémonies liturgiques du Souverain Pontife, vient de publier un ouvrage dont le titre traduit bien la situation dans laquelle se trouvent les fidèles en raison de l'effondrement de la liturgie dans bien des paroisses, dans bien des communautés religieuses, dans bien des cathédrales : « Comment aller à la messe sans perdre la foi ? ».
La question que pose le titre de l'ouvrage de Mgr Bux est celle-ci : la participation à la liturgie eucharistique, telle qu'elle est actuellement célébrée par l'immense majorité des prêtres, ne met-elle pas en péril la disposition des fidèles à se maintenir dans la foi reçue des Apôtres dont l'Eglise est dépositaire ?

 

 

 

Quand on voit comment se comportent à l'autel la majorité des prêtres, on ne peut que constater leur profonde inculture en matière de liturgie : ils ignorent - parce qu'on ne le leur a jamais appris - que la liturgie est avant tout une action symbolique composée de rites organisés d'une façon en même temps rationnelle et harmonieuse afin de pouvoir exprimer, renforcer et fortifier la foi. (Cf. Romano Guardini et Exhortation Sacramentum caritatis); ils ignorent qu'une action symbolique ne doit être ni expliquée, ni commentée, sous peine de lui faire perdre la densité de sens le plus profond; et dans le même temps, ils ne perçoivent plus la nécessité de veiller à la rationalité et à l'harmonie de la liturgie. 
De là vient que, quand ils sont à l'autel, nos prêtres - évêques en tête - ne saisissent plus pourquoi il est d'une extrême importance d'avoir un comportement digne et d'être en pleine possession des rites. Ils ne voient plus que c'est précisément en ayant un comportement exemplaire et en respectant les rites qu'ils protègent et garantissent le hiératisme, l'ordonnancement, la magnificence de la liturgie en tant qu'elle est le culte rendu à la majesté divine et en tant qu'elle protège les fidèles du danger de croire en un Dieu qui n'est pas celui que Jésus a révélé.
Là où la liturgie n'est plus respectée ni dignement célébrée, ce qui est malheureusement le cas dans la totalité des diocèses de France, ce qui se fait à l'autel conduit à croire en un Dieu qui n'est plus le Dieu personnel de Jésus-Christ, mais plutôt une sorte d'idée plus ou moins vague de Dieu à partir de laquelle chacun peut se construire une croyance adaptée à sa "pointure" spirituelle : laxiste pour les uns, étroite pour les autres; démonstrative pour certains, rigoriste pour d'autres... etc.


 

Mais comment protéger le hiératisme, la dignité, l'intégrité, l'essence de la liturgie ? Nous avons à notre disposition deux moyens qui, depuis Vatican II, n'ont plus été utilisés puisqu'ils étaient considérés comme "dépassés" et contraires aux orientations pastorales à la mode. Ces moyens sont la célébration versus orientem (donc, le prêtre tournant le dos à l'assemblée depuis l'offertoire jusqu'à la fin de la communion), et l'usage du latin/grégorien.
Ces deux éléments devraient être partout utilisés sans aucune modération pour remettre les fidèles - les prêtres en premier lieu - sur les bons "rails liturgiques" menant à redécouvrir qu'une célébration n'est pas fructueuse si elle donne à tout voir et à tout comprendre. Cette affirmation peut sembler totalement farfelue après 40 années d'usage liturgique où l'on a dit exactement le contraire; mais pourtant elle est tout à fait exacte, tout à fait conforme au véritable "esprit de la liturgie" de l'Eglise.
Ne pas tout voir, ne pas tout comprendre : cela conduit à habituer le coeur à chercher ce que l'oeil ne perçoit pas, à habituer l'intelligence à saisir ce que le langage formel ne rend pas directement compréhensible. Ne pas tout voir ni tout comprendre, c'est se donner les moyens d'entrer dans le mode de fonctionnement propre à la liturgie; c'est se laisser guider, captiver, entraîner par le rythme spécifique de la liturgie. C'est prendre peu à peu conscience que ce qui ne se voit pas est plus important que ce qui saute aux yeux, que ce qui ne se comprend pas est plus essentiel que ce qui est véhiculé par des mots. 
C'est apprendre à être dans la liturgie plutôt qu'à faire quelque chose au cours de la liturgie : celui qui cherche à faire quelque chose pour rendre une célébration intéressante est déjà dans l'erreur, avait dit Benoît XVI (Cf. Allocution au moines cisterciens d'Heiligenkreuz).

 

La seule liturgie fructueuse qui soit est celle qui apprend au fidèle à mettre son âme dans la lumière de Dieu. Il faut impérativement que nos célébrants s'emploient à y mettre du silence, de l'effacement, de la régularité, de la dignité, de l'humilité. 
Si les évêques ne s'emploient pas à restituer cette liturgie-là, alors le rite romain disparaîtra irrémédiablement pour être remplacée par des célébrations quelconques qui amèneront les fidèles à progressivement perdre la foi, comme le laisse clairement entendre Mgr Nicola Bux.

 

Pro Liturgia

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5 janvier 2010 2 05 /01 /janvier /2010 04:08
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4 janvier 2010 1 04 /01 /janvier /2010 13:02

Lors d’un discours donné en avril 2008 devant l’Institut pontifical Jean-Paul II pour la famille, le pape Benoît XVI avait évoqué la « conspiration du silence » qui enveloppe « le drame de l’avortement » et « ses conséquences dévastatrices dans la famille et la société, notamment par la mentalité matérialiste de mépris de la vie qu’il entretient ». (…) Il n’est plus possible d’ignorer que les jeunes générations de professionnels de santé s’abritent de plus en plus derrière leur clause de conscience. Les jeunes médecins n’en font plus un principe idéologique militant comme certains de leurs aînés et savent parfaitement de par leurs études que pratiquer une IVG revient à infliger la mort à un enfant qui aurait dû naître. (…) L’objection de conscience est (…) devenue la nouvelle bête noire des plannings familiaux européens qui ne décolèrent pas contre l’augmentation sans précédent des soignants objecteurs dans plusieurs États européens comme l’Italie ou l’Espagne. Le danger d’une remise en question du « droit des femmes à disposer de leur corps » est d’ailleurs le prétexte que plusieurs parlementaires ont déniché pour déposer devant le Conseil de l’Europe une proposition de résolution visant à « exclure le droit à l’objection de conscience dans un cadre institutionnel en interdisant l’ensemble des cliniques et des hôpitaux publics à l’invoquer » (...).

 

 

→ Article à lire en son intégralité sur le site de La Nef

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4 janvier 2010 1 04 /01 /janvier /2010 12:06

Dans une récente interview parue dans le magazine « La liturgie, ‘culmen et fons’ », Mgr Guido Marini, commentant le « Gloria » chanté à la Messe de Noël célébrée par le Pape, a rappelé que « le « Gloria » ne devrait jamais être chanté dans une forme responsoriale. C’est-à-dire avec un refrain repris par les fidèles tandis qu’une chorale ou un soliste chante les versets. Pour le « Gloria », c’est toute l’assemblée - divisée en deux chœurs - qui doit chanter tout le texte. Le Cardinal Lustiger avait rappelé ce point dans un petit livret, mais l’on constate que l’erreur est désormais bien ancrée dans de nombreuses paroisses, justifiée par le fait que cette pratique facilite la « participation » des fidèles... où permet à un animateur liturgique de se mettre en scène. Participation, peut-être... Mais sûrement pas à ce qui est prévue par la liturgie ! Il faut chercher l’origine de cette pratique erronée - et d’autres analogues - dans le fait qu’on a dissocié un texte de la forme musicale à laquelle il a lui-même donné naissance pour s’intégrer dans la liturgie. Avec pour résultat - comme le note Fulvio Rampi - la consolidation d’un grave malentendu sur le sens de la « participation active » de l’assemblée dans le « cursus » de la liturgie puisque le « comment » on chante vient désormais avant le « qui » doit chanter. En soumettant l’assemblée des fidèles au « comment » il faut chanter, on en vient à truffer les célébrations de petits refrains ou de chansonnettes qu’on assemble tant bien que mal les unes avec les autres avec pour résultat de priver les fidèles de l’authentique liturgie de l’Eglise, laquelle est constituée d’une harmonieuse cohérence entre les rites, les chants, les gestes, les attitudes.

 

Pro Liturgia

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3 janvier 2010 7 03 /01 /janvier /2010 20:02

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3 janvier 2010 7 03 /01 /janvier /2010 19:58

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3 janvier 2010 7 03 /01 /janvier /2010 19:16

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Normal, il a été un temps dans le très progressiste diocèse de Strasbourg… Et à Strasbourg (comme partout ailleurs), les stupidités liturgiques sont courantes… Le pire est que Mgr Vincent Jordy a été pendant un temps "supérieur du séminaire de Strasbourg". On comprend pourquoi les jeunes ne veulent plus rentrer au Séminaire...

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3 janvier 2010 7 03 /01 /janvier /2010 17:56

 

Les jésuites et les dominicains ont la réputation de ne pas faire bon ménage,

les seconds accusant les premiers d'esprit tortueux. 

Un jour, un jésuite débarque à Rome, et aborde un dominicain

 pour lui demander le chemin de la basilique Saint-Pierre. 

"Mon Père, dit le dominicain, vous ne trouverez jamais, c'est tout droit."

 

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3 janvier 2010 7 03 /01 /janvier /2010 16:30

Mexico est devenue la première ville de l’Amérique Latine à légaliser les mariages homosexuels. La législation approuvée la veille de Noël va bien au-delà de celle de 2006, qui permettait les unions civiles entre couples du même sexe, accordant à ces derniers les mêmes bienfaits financiers qu’aux couples hétérosexuels. Avec le vote favorable du parlement, les couples homosexuels auront aussi la possibilité d’adopter des enfants. Devant le débat qui s’est ouvert au Mexique sur la reconnaissance des unions homosexuelles au même rang que le mariage, la Conférence épiscopale du Mexique a élevé la voix pour défendre le vrai mariage, entre un homme et une femme. Le Secrétaire général de l’épiscopat, Mgr Victor Rene Rodriguez, a affirmé que les évêques exprimaient leur soutien à l’Archevêque de Mexico, le Cardinal Norberto Rivera, et à « toute initiative que l’Archidiocèse de Mexico entreprendrait en lien avec ce thème, cause de polémiques dans la société et à l’intérieur de la famille ». L’institution de la famille est en effet responsable de la procréation et de présenter aux enfants un père et une mère, comme référence pour leur éducation et leur développement comme personnes. En ce sens, les évêques de différents états mexicains ont exprimé leur solidarité au Cardinal Rivera Carrera, pour s’être exprimé en défense des principes de la famille et des droits des mineurs. L’Archevêque de Guadalajara, le Cardinal Juan Sandoval Iñiguez, a dit que l’approbation des unions homosexuelles était déplorable. Concernant la possibilité d’adopter des enfants, il a souligné que « c’est la chose la plus absurde, car elle compromet gravement l’enfant adopté, car elle déforme totalement sa capacité d’identité ». L’Archidiocèse de Mexico a dénoncé publiquement les violentes critiques reçues de différents secteurs anti-catholiques pour avoir défendu la famille : « les insultes et les accusations contre l’Eglise catholique et ses ministres se sont multipliées pendant ces jours, non seulement de la part de certains hommes politiques du District fédéral, mais aussi parmi de nombreux analystes et commentateurs des médias, qui ont exprimé le degré d’intolérance auquel nous sommes arrivés au Mexique ».

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3 janvier 2010 7 03 /01 /janvier /2010 12:36

Pour répondre à cette question délicate, il faut commencer par regarder quels sont les droits des fidèles puis, ensuite, de voir si les évêques respectent ces droits. Le Droit canonique précise les droits des fidèles : - « Les fidèles ont le droit de recevoir de la part des Pasteurs sacrés l’aide provenant des biens spirituels de l’Eglise, surtout de la Parole de Dieu et des sacrements. » (Can. 213) - « Les fidèles ont le droit de rendre le culte à Dieu selon les dispositions de leur rite propre approuvé par les Pasteurs légitimes de l’Eglise (...). » (Can. 214)




Il est évident que dès lors que les Pasteurs sacrés ne procurent plus l’aide que demandent les fidèles ou interdisent - de quelque façon que ce soit - que ces mêmes fidèles rendent un culte à Dieu selon les dispositions rituelles approuvée par l’Eglise, ils s’exposent à la critique. Ces deux points doivent être complétés par un élément supplémentaire : dès lors que les fidèles constatent que ce que leur font faire les Pasteurs diocésains est contraire à ce qu’enseigne le Saint Père, il y a matière supplémentaire à critique. Reste une autre question : comment doit se faire cette critique ? Pour ce qui est des abus en liturgie, le Siège apostolique, dans l’Instruction Redemptionis Sacramentum rédigée à la demande du BX Jean-Paul II, répond que tous les fidèles, qu’ils soient clercs ou laïcs, ont le droit de prêter une attention particulière à ce que le très saint Sacrement de l’Eucharistie soit défendu contre tout manque de respect et toute déformation, et que tous les abus soient complètement corrigés. Et il est reconnu à tout catholique, qu’il soit prêtre, diacre ou fidèle laïc, le droit de se plaindre d’un abus liturgique, auprès de l’Evêque diocésain ou encore auprès du Siège Apostolique en raison de la primauté du Pontife Romain. Il est donc clair que les évêques ont de devoirs (Cf. Can. 213 et 214 ci-dessus) et que les fidèles - tous les fidèles sans exception - ont des droits qui doivent être respectés. Reste à savoir comment doivent être formulées les plaintes éventuelles.

 

Il est dit, dans les documents magistériels, qu’il faut d’abord s’adresser aux évêques eux-mêmes. Mais le problème est le suivant : quel intérêt y a-t-il à signaler des abus à ceux qui en sont souvent les auteurs ? Par ailleurs, on sait que les abus ont été maintes fois signalés dans des études anciennes ou récentes, y compris dans les documents des papes eux-mêmes. Or ces publications, qui faisaient état de faits constatés, se sont heurtées à l’indifférence totale des évêques. C’est donc par la force des choses que les fidèles en arrivent à utiliser internet pour dénoncer un grave problème de désobéissance ou de laisser-aller conduisant à ce que de nombreux fidèles sont aujourd’hui plongés dans l’incertitude doctrinale et la misère spirituelle. On relira avec profit le Décret Christus Dominus de Vatican II sur la charge pastorale des évêques dans l’Eglise.

 

Pro Liturgia

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3 janvier 2010 7 03 /01 /janvier /2010 10:30

Dix ans du motu proprio Ecclesia Dei

Conférence du Cardinal Joseph Ratzinger

 

A l'occasion des dix ans du Motu proprio « Ecclesia Dei », promulgué par le Pape Jean-Paul II,

des pèlerins se sont rendus à Rome. Le cardinal Joseph Ratzinger, Préfet de la Congrégation

pour le Doctrine de la foi, a prononcé devant eux une conférence sur la liturgie. En voici le texte :

 

 

 


saintsacrificedelamesse-copie-1.jpg     Dix ans après la publication du Motu proprio Ecclesia Dei, quel bilan peut-on dresser? Je pense que c'est avant tout une occasion pour montrer notre gratitude et pour rendre grâces. Les diverses communautés nées grâce à ce texte pontifical ont donné à l'Eglise un grand nombre de vocations sacerdotales et religieuses qui, zélées, joyeuses et profondément unies au Pape, rendent leur service à l'Evangile dans cette époque de l'histoire, qui est la nôtre. Par eux, beaucoup de fidèles ont été confirmés dans la joie de pouvoir vivre la liturgie, et dans leur amour envers l’Eglise ou peut-être ils ont retrouvé les deux. Dans plusieurs diocèses — et leur nombre n'est pas si petit! — ils servent l’Eglise en collaboration avec les évêques et en relation fraternelle avec les fidèles, qui se sentent chez eux dans la forme rénovée de la liturgie nouvelle. Tout cela ne peut que nous inciter aujourd'hui à la gratitude ! Cependant, il ne serait pas très réaliste de vouloir passer sous silence les choses moins bonnes: qu'en maints endroits les difficultés persistent et continuent à persister, parce que tant les évêques que les prêtres et les fidèles considèrent cet attachement à la liturgie ancienne comme un élément de division, qui ne fait que troubler la communauté ecclésiale et qui fait naître des soupçons sur une acceptation du Concile « sous réserve seulement », et plus généralement sur l'obéissance envers les pasteurs légitimes de l’Eglise. 

 

 

 

Une méfiance envers l'ancienne liturgie

   

Nous devons donc nous poser la question suivante: comment ces difficultés peuvent être dépassées ? Comment peut-on construire la confiance nécessaire pour que ces groupes et ces communautés qui aiment l'ancienne liturgie puissent être intégrés paisiblement dans la vie de l'Eglise ? Mais il y a une autre question sous-jacente à la première: quelle est la raison profonde de cette méfiance ou même de ce refus d'une continuation des anciennes formes liturgiques ? Il est sans doute possible que, dans ce domaine, existent des raisons qui sont antérieures à toute théologie et qui ont leur origine dans le caractère des individus ou dans l'opposition des caractères divers, ou bien dans d'autres circonstances tout à fait extérieures. Mais il est certain qu'il y a aussi des raisons plus profondes, qui expliqueraient ces problèmes. Les deux raisons qu'on entend le plus souvent, sont le manque d'obéissance envers le Concile qui aurait réformé les livres liturgiques, et la rupture de l'unité qui devrait suivre nécessairement, si on laissait en usage des formes liturgiques différentes. Il est relativement facile de réfuter théoriquement ces deux raisonnements: le Concile n'a pas reformé lui-même les livres liturgiques, mais il en a ordonné la révision et, à cette fin, a fixé quelques règles fondamentales. Avant tout, le Concile a donné une définition de ce qui est la liturgie, — et cette définition donne un critère valable pour chaque célébration liturgique. Si l’on voulait mépriser ces règles essentielles et si l'on voulait mettre de coté les « normae generales », qui se trouvent aux numéros 34-36 de la Constitution « De Sacra Liturgia », alors là, on violerait l'obéissance envers le Concile! C'est donc d'après ces critères qu'il faut juger les célébrations liturgiques, qu'elles soient selon les livres anciens ou selon les livres nouveaux. Il est bon de rappeler ici, ce qu'a constaté le Cardinal Newman qui disait que l'Eglise, dans toute son histoire, n'avait jamais aboli ou défendu des formes liturgiques orthodoxes, ce qui serait tout à fait étranger à l’Esprit de l'Eglise. Une liturgie orthodoxe, c’est-à-dire qui exprime la vraie foi, n'est jamais une compilation faite selon des critères pragmatiques de diverses cérémonies, dont on pourrait disposer de manière positiviste et arbitraire — aujourd’hui comme ça et demain autrement. Les formes orthodoxes d'un rite sont des réalités vivantes, nées du dialogue d'amour entre l'Eglise et son Seigneur, elles sont des expressions de la vie de l’Eglise, où se sont condensées la foi, la prière et la vie même de générations, et où se sont incarnées dans une forme concrète en même temps l'action de Dieu et la réponse de l’homme. De tels rites peuvent mourir, si le sujet qui les a portés historiquement disparaît, ou si ce sujet s'est inséré dans un autre cadre de vie. L’autorité de l'Eglise peut définir et limiter l'usage des rites dans des situations historiques diverses, mais jamais elle ne les défend purement et simplement! Ainsi, le Concile a ordonné une réforme des livres liturgiques, mais il n'a pas interdit les livres antérieurs. Le critère que le Concile a exprimé, est à la fois plus vaste et plus exigeant: il invite tous à l’autocritique! Mais nous reviendrons sur ce point. 

 

 

 

L'existence de deux rites peut-elle briser l'unité ?

 

Il faut encore examiner l'autre argument, qui prétend que l'existence de deux rites peut briser l'unité. Là, il faut faire une distinction entre le côté théologique et le côté pratique de la question. Pour ce qui est du côté théorique et fondamental, il faut constater que plusieurs formes du rite latin ont toujours existé, et qu'ils se sont retirés seulement lentement suite à l'unification de l'espace de vie en Europe. Jusqu’au Concile existaient, à côté du rite romain, le rite ambrosien, le rite mozarabe de Tolède, le rite de Braga, le rite des Chartreux et des Carmes, et le plus connu: le rite des Dominicains, — et peut-être d'autres rites encore que je ne connais pas. Personne ne s’est jamais scandalisé, que les Dominicains, souvent présents dans nos paroisses, ne célébraient pas comme les curés, mais avaient leur rite propre. Nous n’avions aucun doute, que leur rite fût catholique autant que le rite romain, et nous étions fiers de cette richesse d'avoir plusieurs traditions diverses. En outre, il faut dire ceci: l'espace libre, que le nouvel Ordo Missae donne à la créativité, est souvent élargi excessivement; la différence entre la liturgie selon les livres nouveaux, comme elle est pratiquée en fait, célébrée en des endroits divers, est souvent plus grande que celle entre une liturgie ancienne et une liturgie nouvelle, célébrées toutes les deux selon les livres liturgiques prescrits. Un chrétien moyen sans formation liturgique spéciale a du mal à distinguer une messe chantée en latin selon l'ancien Missel d'une messe chantée en latin selon le nouveau Missel; par contre, la différence entre une liturgie célébrée fidèlement selon le Missel de Paul VI et les formes et les célébrations concrètes en langue vulgaire avec toutes les libertés et créativités possibles, la différence peut être énorme ! Avec ces considérations nous avons déjà franchi le seuil entre la théorie et la pratique, où les choses sont naturellement plus compliquées, puisqu'il s'agit des relations entre des personnes vivantes. Il me semble, que les aversions dont nous avons parlé sont si grandes parce qu'on met en relation les deux formes de célébration avec deux attitudes spirituelles différentes, à savoir avec deux manières différentes de percevoir l’Eglise et l'existence chrétienne tout court. Les raisons pour cela sont multiples. La première est celle-ci: on juge les deux formes liturgiques à partir des éléments extérieurs et on arrive ainsi à la conclusion suivante: il y a deux attitudes fondamentales différentes. Le chrétien moyen considère essentiel pour la liturgie rénovée, qu'elle soit célébrée en langue vulgaire et face au peuple, qu'il y existe un grand espace libre pour le créativité et que les laïcs y exercent des fonctions actives. Par contre : est considéré essentiel pour la célébration selon le rite antique, qu’elle se dise en langue latine, que le prêtre soit tourné vers l'autel, que le rite soit prescrit sévèrement et que les fidèles suivent la messe en priant en privé, sans avoir une fonction active. Dans cette optique, la phénoménologie est essentielle pour une liturgie, non pas ce qu'elle considère elle-même comme essentiel. Il fallait s'attendre à ce que les fidèles s’expliquent la liturgie à partir des formes concrètes visibles et qu’ils soient imprégnés spirituellement par ces formes-là, et que les fidèles ne pénètrent pas facilement dans les profondeurs de la liturgie. 

 

 

 

La liturgie appartient au Corps tout entier de l'Eglise

 

Les contradictions et oppositions que nous venons d’énumérer, ne proviennent ni de l'esprit ni de la lettre des textes conciliaires. La Constitution sur la Liturgie (Sacrosanctum Concilium) elle-même ne parle pas du tout de la célébration face à l’autel ou face au peuple. Et au sujet de la langue, elle dit que le latin doit être conservé tout en donnant une place plus large à la langue maternelle, « surtout dans les lectures, les monitions, dans un certain nombre de prières et de chants (SC 36, 2) ». Quant à la participation des laïcs, le Concile insiste d'abord en général que la liturgie est essentiellement l'affaire du Corps du Christ tout entier, Tête et membres, et que pour cette raison, elle appartient au Corps tout entier de l'Eglise « et qu'elle est par conséquent destinée à être célébrée en communauté avec participation active des fidèles ». Et le texte précise: « Dans les célébrations liturgiques chacun, ministre ou fidèle, en s’acquittant de sa fonction, fera seulement et totalement ce qui lui revient en vertu de la nature de la chose et des normes liturgiques » (SC 28). « Pour promouvoir la participation active, on favorisera les acclamations du peuple, les réponses, le chant des psaumes, les antiennes, les cantiques et aussi les actions ou gestes et les attitudes corporelles. On observera aussi en son temps un silence sacré » (SC 30). Voilà les directives du Concile: à tous elles peuvent donner matière à réflexion. Parmi un nombre de liturgistes modernes il y a malheureusement une tendance à développer les idées du Concile dans une seule direction; en agissant ainsi, on finira par renverser les intentions du Concile. La position du prêtre est réduite par quelques-uns au pur fonctionnel. Le fait que le Corps du Christ tout entier est le sujet de la liturgie, est souvent déformé au point que la communauté locale devient le sujet autosuffisant de la liturgie et en distribue les divers rôles. Il existe aussi une tendance dangereuse à minimaliser le caractère sacrificiel de la Messe et de faire disparaître le mystère et le sacré, sous le prétexte, soi-disant impératif, de se faire comprendre plus facilement. Enfin, on constate la tendance à fragmenter la liturgie et à souligner unilatéralement son caractère communautaire, en donnant à l'assemblée le pouvoir de décider sur la célébration. Mais heureusement, il y a aussi un certain dégoût du rationalisme plein de banalité et du pragmatisme de certains liturgistes, soient-ils théoriciens ou praticiens, et on constate un retour au mystère, à l'adoration et au sacré, et au caractère cosmique et eschatologique de la liturgie, dont témoigne l'Oxford-Declaration on Liturgy de 1996. D'autre part, il faut admettre que la célébration de l'ancienne liturgie s'était égarée trop dans le domaine de l'individualisme et du privé, et que la communion entre prêtre et fidèles était insuffisante. J'ai un grand respect pour nos aïeux, qui disaient durant les messes basses les « Prières pendant la messe », que leur livre de prières proposait, — mais certainement on ne peut considérer cela comme l'idéal de la célébration liturgique! Peut-être, ces formes réduites de célébration sont la raison profonde pour laquelle la disparition des livres liturgiques anciens n'a eu aucune importance dans beaucoup de pays et n'a causé aucune douleur. On n'a jamais été en contact avec la liturgie elle-même. D’autre part, là où le Mouvement liturgique avait créé un certain amour pour la liturgie, — là où ce mouvement avait anticipé les idées essentielles du Concile, comme par exemple la participation priante de tous à l'action liturgique, — là était plus grande la douleur face à une réforme liturgique entreprise trop en hâte et se limitant souvent à l'aspect extérieur. Là où le Mouvement liturgique n'a jamais existé, la réforme n'a d'abord pas posé de problème. Les problèmes se sont posés seulement de façon sporadique là où une créativité sauvage a fait disparaître le mystère sacré. Voilà pourquoi il est si important d’observer les critères essentiels de la Constitution sur la Liturgie, que j'ai cités plus haut, aussi si l’on célèbre selon le Missel ancien! Au moment où cette liturgie touche vraiment les fidèles par sa beauté et sa profondeur, alors elle sera aimée, et alors elle ne sera pas en opposition inconciliable avec la Liturgie nouvelle, pourvu que ces critères soient vraiment appliqués comme le Concile l'a voulu. Des accents spirituels et théologiques différents continueront, certes, à exister; mais ils ne seront plus deux manières opposées d’être chrétien, mais plutôt des richesses qui appartiennent à la même et unique foi catholique. Lorsque, il y a quelques années, quelqu'un avait proposé « un nouveau mouvement liturgique » pour éviter que les deux formes de liturgie ne s'éloignent trop l'une de l'autre et pour mettre en évidence leur convergence intime, quelques amis de l'ancienne liturgie ont exprimé leur peur que ceci ne soit qu'un stratagème ou une ruse, pour pouvoir éliminer enfin complètement l'ancienne liturgie. Il faut que de telles anxiétés et peurs cessent enfin! Si dans les deux formes de célébration l'unité de la foi et l'unicité du mystère apparaissent clairement, cela ne peut qu'être pour tous une raison de se réjouir et de remercier le Bon Dieu. Dans la mesure où nous tous croyons, vivons et agissons selon ces motivations, nous pourrons aussi persuader les évêques, que la présence de l'ancienne liturgie ne dérange et ne brise pas l'unité de leur diocèse, mais qu’elle est plutôt un don destiné à construire le Corps du Christ, dont nous sommes tous les serviteurs. Ainsi chers amis, je voudrais vous encourager à ne pas perdre patience, à conserver la confiance, et à puiser dans la liturgie la force nécessaire pour donner notre témoignage pour le Seigneur en notre temps.

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2 janvier 2010 6 02 /01 /janvier /2010 18:16
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2 janvier 2010 6 02 /01 /janvier /2010 08:43

L’objection la plus souvent avancée contre la messe célébrée en latin, est qu’elle ne favorise pas la « participation » active des fidèles qui a été demandée par les pères du concile Vatican II. Dans une messe célébrée en latin, les fidèles seraient réduits à n’être que des spectateurs plus ou moins muets d’une action qui ne concernerait que le célébrant. En 2007, au n. 52 de l’Exhortation post-synodale « Sacramentum Caritatis » Benoît XVI écrivait que « le concile Vatican II avait opportunément voulu un développement particulier de la participation active, pleine et fructueuse du peuple de Dieu tout entier à la célébration eucharistique. Le renouveau mis en œuvre au cours de ces années a bien certainement favorisé des progrès notables dans la direction souhaitée par les Pères conciliaires. » Le Pape rappelait « Sacrosanctum Concilium » et rappelait que la participation des fidèles à la Messe devait être « actuosa, plena, fructuosa » C’était le vœu des pères conciliaires ; ça devrait être notre souci, notre objectif. Et Benoît XVI ajoutait : « Nous ne devons pas cependant nous cacher qu’une certaine incompréhension, précisément sur le sens de cette participation, s’est parfois manifestée. Il convient par conséquent de dire clairement que, par ce mot, on n’entend pas faire référence à une simple attitude extérieure durant la célébration. »

 

 

 

 

saint-sacrifice-messeCette précision apportée par le Pape est importante ; elle nous pousse à demander en quoi doit alors consister la participation « active, pleine et fructueuse » à la liturgie. Curieusement, Benoît XVI ne nous dit pas en quoi doit précisément consister la « participation » ; il préfère plutôt nous dire ce qu’elle ne doit pas être : « participer » ne veut pas dire « faire quelque chose » pendant que le prêtre à l’autel dit des prières et accomplit les rites prescrits. Souvenons-nous des terribles années 80. Avant la Messe, on s’employait à faire un programme : pendant l’offertoire, on chantera « Les mains ouvertes devant toi, seigneur » ; pendant la communion, « Pour inventer la liberté »... A la fin de la célébration, le prêtre était heureux si la Messe avait été bruyante ; pour lui, c’était la preuve que les fidèles avaient « participé ». Chacun pouvait rentrer chez lui dans les dispositions de quelqu’un qui venait d’assister à un concert. Il est vrai qu’à cette époque-là, bien peu de catéchistes rappelaient aux enfants que la messe est le Saint Sacrifice du Christ sur la Croix qui se renouvelle de façon non sanglante sur l’autel par les mains du prêtre, « alter Christus ». Donc, le pape explique ce que l’on doit entendre par « participation ». Il nous rappelle qu’en dépit de ce que peuvent penser certains clercs aujourd’hui encore, aucun des pères conciliaires n’était un « rocker » ou un « hippie » désireux de transformer la liturgie de l’Eglise en une sorte de « Woodstock ». Se souvenant de l’époque du Concile auquel il a lui-même participé, Benoît XVI souligne que la « participation active » à la liturgie telle qu’elle était souhaitée par Vatican II doit être comprise en termes plus substantiels : elle doit consister en une plus grande prise de conscience du mystère célébré et de sa relation à la vie quotidienne. Encore pleinement valable est la recommandation conciliaire de la Constitution « Sacrosanctum Concilium », exhortant les fidèles à ne pas assister à la liturgie eucharistique, « comme des spectateurs étrangers et muets », mais en participant « à l’action sacrée en connaissance de cause, pieusement et activement. » C’est le point capital : comme l’ont souhaité les pères conciliaires et comme le rappelle Benoît XVI, il n’est pas possible d’être à la Messe comme des étrangers, comme des spectateurs muets. Peut-être étions-nous de tels étrangers à la liturgie - du moins certains d’entre nous - quand nous pensions, de bonne foi, que l’essentiel était d’avoir des guitares bien accordées et que l’emploi des bongos ou des maracas allait donner l’envie d’aller à l’église. Pendant le temps de communion, l’essentiel était de pouvoir finir tous les couplets du chant choisi... Etrangers à la liturgie, nous l’avons été lorsque nous avons « zappé » la communion sous prétexte d’interpréter « notre » morceau, lorsque nous avons suivi les catéchistes qui, dans leur ignorance crasse, nous invitaient à imaginer des célébrations ressemblant plus à une fête d’équipe sportive qu’à la célébration liturgique. D’autre part, au sujet de l’assistance à la Messe en « spectateurs muets », il est malvenu de critiquer la liturgie qui se faisait jusqu’au moment du Concile en avançant qu’elle ne facilitait pas - ou même interdisait - la « participation » des fidèles. Il ne faudrait tout de même pas oublier, en effet, que pendant 2 000 ans de christianisme, les saints et les saintes nous ont enseigné la valeur du silence : d’un silence qu’il ne faut pas confondre avec la mutité qui, elle, n’est pas le silence mais l’absence de parole.

 

Que se passe-t-il sur l’autel durant la Messe ? Il se produit un mystère ineffable, indicible, qui fait que le Christ se rend présent sous les espèces du pain et du vin. On ne célèbre pas un symbole ! On ne célèbre pas une image, une idée ! Le Christ est vraiment là, présent dans l’hostie et la coupe de vin que tiennent les mains du prêtre. C’est un grand Mystère, indicible, si « scandaleux « pour l'intelligence humaine que la seule façon d’y adhérer est de faire appel à la foi : Mysterium fidei. C’est dans la relation avec ce Mystère si grand et profond que nous devons nous demander ce que signifie être des spectateurs « muets » et ce que signifie « participer activement, pleinement et fructueusement ». Il est clair que le concept de « participation » n’a pas de sens absolu. Imaginons un jeune « fan » de football qui assiste à un match ; pour lui, « participer » signifie crier, applaudir, encourager l’équipe dont on est le « supporter », éventuellement vociférer contre l'arbitre qui n’a pas vu une faute, agiter drapeaux et souffler dans des vuvuzelas... Imaginons maintenant ce qui se passerait si ce jeune « fan » était en classe et voulait « participer » comme il l’a fait au stade... Au théâtre, à l’opéra, à l’école, au cours d’une conférence... c’est toujours la « participation active » des spectateurs ou des auditeurs qui est demandée. Mais une participation par le silence et l’attention. Un silence qui n’est jamais le « mutisme », car le « mutisme » signifie l’arrêt de l’attention, de l’intelligence ; le « mutisme » traduit la résignation, une volonté d’humilier la parcelle d’intelligence divine que possède le génie humain. Le silence est le contraire du « mutisme » : il traduit l’écoute, l’adhésion, la réflexion. Devant le Mystère, le silence est participation ; et vouloir le chasser ne procède que d’une recherche de la distraction à tout prix. Or la distraction ne naît que de l’incompréhension, c’est-à-dire d’un humiliant renoncement à comprendre. Cela peut nous sembler paradoxal, mais devant le Mystère, le silence est la vraie « participation » tandis que le bruit de certains chants, des commentaires, des explications, n’est que l’expression d’un « mutisme » : le « mutisme » de l’âme qui se cache derrière le flot des paroles et de cette agitation qu’on appelle aujourd’hui « animation liturgique ». La docte ignorance des philosophes qui admettent qu’ils ne savent pas et ne peuvent pas savoir, produit le « mutisme ». Au contraire, l'intelligence éclairée par la grâce mais demeurant dans la perception consciente de ses limites se sublime dans le silence qui est abandon confiant à Dieu, qui est adoration et prière. Là est la vraie « participation ». J’aime utiliser le peu de latin que je sais et le peu de rhétorique latine que j’ai étudiée pour profiter pleinement du goût sublime de certaines expressions liturgiques, surtout celles de la Prière eucharistique dont l’Auteur qui nous restera à tout jamais inconnu bénéficia incontestablement de la Lumière divine. Mais je ne me fais pas d’illusions : le peu de latin que je sais ne fait pas de moi un meilleur chrétien, ni un fidèle plus apte à « participer » à la messe, qu’elle soit célébrée en latin ou en langue vernaculaire. En effet, la compréhension de la lettre du texte est de nature à créer l'illusion que la raison peut enfin saisir le Mystère célébré. Souvenons-nous de l’histoire de cet enfant qui, avec une coquille, faisait semblant de croire qu’il pourrait transvaser toute l’eau de la mer dans le trou qu’il avait creusé dans le sable. Cette histoire nous apprend que le sublime n’est pas dans la compréhension du Mystère, mais dans la prise de conscience de nos propres limites. C’est seulement à ce moment-là que, éclairé par la grâce, dans un abandon filial en Dieu qu’on peut aller au-delà de ce que montre la liturgie afin d’appréhender le Mystère non pas en termes de « compréhension » illusoire, mais par l’intuition, la contemplation et l’adoration.

 

« En latin, on ne comprend pas », disent beaucoup de fidèles. Pourtant, la liturgie n’est-elle pas faite de gestes, de signes, de symboles qui, en parlant au cœur, vont plus loin que ce que peut transmettre le latin ou toute autre langue qui ne s’adresse qu’à « tête » ? En toute honnêteté, je ne pense pas que la messe célébrée de façon fructueuse durant des siècles par l’Eglise ait tous ces défauts sur lesquels certains insistent - souvent, par paresse ou peut-être par crainte d’avoir à se remettre en cause -. Cette obstination à critiquer l’usage du latin sent parfois un peu le soufre... Si l’usage du latin pouvait redevenir habituel - à côté d’autres possibilités légitimes - les fidèles ne viendraient pas à la Messe en découvrant à chaque fois une nouvelle façon de traiter la liturgie : ils seraient plutôt conduits à retrouver le sens du sacré dans chaque célébration eucharistique et deviendraient ainsi étrangers au « one-man-show » que certains prêtres s’emploient à faire dès qu’ils sont à l’autel. Citons encore Benoît XVI au n. 52 de « Sacramentum Caritatis » : « Développant la réflexion, le Concile poursuivait : que les fidèles « se laissent instruire par la Parole de Dieu, refassent leurs forces à la table du Corps du Seigneur, rendent grâces à Dieu, et qu'offrant la victime sans tache non seulement par les mains du prêtre, mais aussi en union avec lui, ils apprennent ainsi à s'offrir eux-mêmes et soient conduits de jour en jour, par le Christ Médiateur, à la perfection de l'unité avec Dieu et de l'unité entre eux ». Le Pape, qui rappelle ici « Sacrosanctum Concilium », exhorte les fidèles à se laisser former par la Parole de Dieu, à se nourrir à la Table eucharistique, puis à apprendre à s’offrir eux-mêmes de jour en jour. Déjà au n. 51, le Pape avait rappelé le lien intrinsèque entre la liturgie et la mission, entre la célébration des Mystères et la nature missionnaire de l’Eglise. Ce lien fournit la preuve que toute personne est impliquée dans la formule qui achève la Messe : Ite, Missa est ! Cette expression est souvent mal traduite : « Allez dans la paix du Christ ». Comme si la Messe était finie ! Comme si une Messe pouvait « finir » ! Non, elle ne finit pas. L’usage du latin nous invite à la vivre avec attention afin de la prolonger intérieurement dans le calme.

 

(D’après Giovanni SCHINAIA)

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