Il est significatif de noter que cette Encyclique qui voulait répondre au problème spécifique de la légitimité ou non de la contraception artificielle porte ce titre : "Humanae Vitae" = de la vie humaine. Au cœur de l'année 1968 où plusieurs parlaient de "révolution sexuelle", c'est-à-dire de la soi-disant "sexualité libérée" du "fardeau" de la transmission de la vie, le Pape Paul VI osait courageusement réaffirmer au monde entier que le très grave devoir des époux est de transmettre la vie humaine, et que l'exercice de leur sexualité ne peut pas être dissocié de l'ouverture à la vie. En s'adressant tout de suite aux époux, il affirmait implicitement, en même temps, que l'exercice de la sexualité n'est légitime que dans le cadre du mariage…
I. Aspects nouveaux du problème (HV 2-6)
Paul VI a évoqué les difficultés de notre temps :
- le rapide développement démographique qui faisait craindre à certains la surpopulation et le risque de famine pour les pays pauvres (40 ans plus tard nous sommes dans "l'hiver démographique" !) ;
- les conditions de travail et de logement, les difficultés économiques et éducatives qui rendraient très difficile l'éducation de nombreux enfants ;
- le changement de mentalité concernant la vocation de la femme et l'amour conjugal dans le mariage ;
- les progrès techniques de l'humanité capable de toujours mieux maîtriser et organiser les forces de la nature, y compris la nature humaine et la transmission de la vie.
Il évoquait aussi les réponses à ces difficultés :
- Il faudrait réviser les règles morales en vigueur jusqu'ici pour que l'homme moderne confie à sa raison et à sa volonté le soin de régler la natalité en maîtrisant les rythmes biologiques de son organisme.
II. Compétence du magistère (HV 4-6)
Paul VI a tenu à préciser que le Magistère de l'Eglise était compétent pour donner avec autorité une réponse à ces questions qui relèvent de la loi naturelle - et donc concernent tous les hommes. Jésus, en donnant autorité à Pierre et aux Apôtres, les a constitués gardiens et interprètes authentiques de toute la loi morale, dont la Loi Naturelle. Paul VI, après avoir fait appel à une Commission de spécialistes, et après mûres réflexions et prières assidues, a donné une réponse que Jean-Paul II considère comme définitive.
III. Principes doctrinaux (HV 7-18)
- Il faut considérer le problème de la natalité dans la lumière d'une vision intégrale de l'homme et de sa vocation : naturelle et terrestre, surnaturelle et éternelle (HV 7) ;
- Il faut bien comprendre la vraie nature de l'amour conjugal dont la source suprême est Dieu Amour. Dieu Créateur a voulu le mariage pour que les époux se donnent dans une donation personnelle et réciproque en vue de la communion de leurs êtres pour collaborer avec Dieu à la génération et à l'éducation de nouvelles vies (HV 8-9) ;
- Cet amour conjugal exige des époux une conscience de leur mission de paternité responsable (HV 10) ;
- L'union sexuelle des époux demeure honnête, digne et légitime, même en période inféconde, si elle demeure toujours ouverte à la transmission de la vie (HV 11) ;
- Le principe fondamental de la morale conjugale est le suivant : Dieu a voulu donner une double signification à l'acte conjugal : l'union et la procréation. L'union sexuelle, réalisée dignement, unit profondément les époux et, en même temps, les rend aptes à la génération de nouvelles vies. C'est en sauvegardant ces deux aspects essentiels, union et procréation, que l'acte conjugal conserve intégralement le sens de mutuel et véritable amour et son ordination à la très haute vocation de l'homme à la paternité. L'homme moderne devrait être en mesure de comprendre le caractère profondément raisonnable et humain de ce principe fondamental (HV 12) ;
- Dissocier volontairement cette double fin de la sexualité, c'est contredire au plan de Dieu et à sa volonté et contredire à la nature de l'homme et de la femme et de leur rapport le plus intime. L'homme et la femme ne sont pas les maîtres des sources de la vie humaine, mais les ministres du dessein établi par le Créateur (HV 13) ;
- Tout acte qui dissocie par quelque moyen que ce soit l'acte sexuel de son ouverture à la vie est immoral (HV 14) ;
- Il peut être licite de tolérer un moindre mal (HV 14) ;
- Il n'est pas permis, même pour de graves raisons, de faire le mal pour qu'il en résulte un bien (HV 14)
- Un acte conjugal rendu volontairement infécond et, par conséquent intrinsèquement déshonnête, ne peut pas être rendu honnête par l'ensemble d'une vie conjugale féconde (HV 14) ;
- Il est licite, pour soigner des maladies, d'utiliser des moyens thérapeutiques vraiment nécessaires, même si l'on prévoit qu'il en résultera un empêchement à la procréation (HV 15) ;
- Il est licite, pour espacer les naissances, pour de sérieux motifs, de recourir aux méthodes naturelles de régulation des naissances (HV 16). Il existe entre ces méthodes et les méthodes contraceptives artificielles une différence essentielle ;
- En déclarant légitimes les méthodes de régulation artificielle de la natalité, on ouvrira la voie à un abaissement général de la moralité et à bien d'autres maux ;
- L'Eglise sait qu'en professant avec courage la Vérité sur l'amour conjugal, elle est, comme Jésus, signe de contradiction, mais elle ne peut pas se taire, car elle n'a pas créé la loi morale ! Elle est la dépositaire et l'interprète de cette loi et elle ne pourra jamais déclarer licite ce qui est opposé au vrai bien de l'homme. En défendant intégralement la morale conjugale, l'Eglise sait qu'elle contribue à l'instauration d'une civilisation vraiment humaine et qu'elle est l'amie sincère et désintéressée des hommes qu'elle veut aider à se préparer à la vie éternelle (HV 18).
IV. Directives pastorales (HV 19-31)
- L'Eglise est la Mère et Maîtresse : comme Jésus, elle connaît les faiblesses humaines, elle est compatissante, elle accueille les pécheurs, mais elle ne peut renoncer à enseigner la loi de l'amour conjugal en vue de du vrai bien des époux (HV 19) ;
- La loi d' "Humanae Vitae" peut paraître difficile, voire impossible à certains, mais, avec l'aide de Dieu et les efforts des époux, il est possible de l'observer, elle ennoblit alors les époux et est bienfaisante pour la communauté humaine (HV 20) ;
- La discipline d' "Humanae Vitae" ne nuit pas à l'amour conjugal, elle lui confère une plus haute valeur humaine par la maîtrise de soi, l'attention délicate à son conjoint, le dialogue, le bannissement de l'égoïsme, le sens de la responsabilité qui permettent aux parents d'être d'authentiques éducateurs de leurs enfants (HV 21) ;
- L'acceptation d' "Humanae Vitae" passe par la lutte contre la pornographie afin de créer un climat favorable à l'éducation de la chasteté (HV 22) ;
- Les gouvernants des peuples doivent être énergiques pour ne pas laisser se dégrader la moralité de leurs sujets, ils ne doivent pas accepter des lois (concernant la famille) contraires à la loi naturelle et divine (HV 23) ;
- Les hommes de science doivent continuer leurs recherches pour donner une base suffisamment sûre à une régulation des naissances fondée sur l'observation des rythmes naturels, et démontrer ainsi qu'il n'y a pas de contradiction entre les lois divines qui règlent la transmission de la vie et celles qui favorisent un authentique amour conjugal (HV 24) : les docteurs Billings et le professeur Odeblad ont répondu aux demandes de Paul VI ;
- Les époux chrétiens doivent désirer tendre à la sainteté de leur état de vie en accueillant avec confiance la loi de Dieu, et en recourant humblement à la miséricorde de Dieu, accordée dans le sacrement de pénitence, si le péché avait encore prise sur eux (HV 25) ;
- Les foyers sont appelés à se faire apôtres et guides d'autres foyers (HV 26). Les moniteurs Billings s'efforcent de répondre de leur mieux à cette importante demande de Paul VI ;
- Les médecins et le personnel sanitaire ont une grande responsabilité dans ce domaine de la transmission de la vie. Ils doivent promouvoir en toute occasion les solutions inspirées par la foi et la droite raison et ils doivent considérer comme un devoir professionnel l'acquisition de toute la science nécessaire dans ce domaine délicat pour pouvoir donner les sages conseils et les saines directives (HV 27) ;
- Les prêtres doivent donner l'exemple d'un assentiment loyal, interne et externe, au Magistère de l'Eglise. Que tous s'en tiennent au Magistère de L'Eglise et parlent un même langage, sans oublier, bien sûr, d'avoir un cœur compatissant et miséricordieux comme celui de Jésus (HV 29) ;
- Les évêques doivent considérer comme l'une de leurs plus urgentes responsabilités la mission de travailler avec ardeur et sans relâche à la sauvegarde et à sainteté du mariage (HV 30) ;
- Tous les hommes doivent comprendre que grande est l'œuvre d'éducation, de progrès et d'amour à laquelle l'Eglise les appelle ! L'homme ne peut trouver le vrai bonheur, auquel il aspire de tout son être, que dans le respect des lois inscrites par Dieu dans sa nature et qu'il doit observer avec intelligence et amour (HV 31).
Liens : Humanae Vitae (25 juillet 1968)