3 février 2008
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« Convertissez-vous car le royaume des Cieux est proche » (Matthieu 3, 2). L’invitation de Jésus à la conversion est toujours actuelle pour un chrétien en marche sur la voie de la perfection évangélique. La grande Thérèse d’Avila rappelait à ses moniales qu’elles étaient entrées au couvent non pour une vie facile, mais pour combattre. Ce combat spirituel, toutefois, ne concerne pas seulement les religieuses et les prêtres, mais tous les fidèles. Il faut en effet toujours combattre contre le vieil homme, contre notre propre égoïsme qui n’accorde pas de trêve à l’homme nouveau. Jésus en parle clairement : « Celui qui veut être mon disciple, qu’il renonce à lui-même… ».
Le disciple du Christ connaît bien la dynamique du renoncement, qui ouvre l’âme à la charité, don de Dieu par excellence. Sans cette dynamique, il n’y a pas d’amour authentique, ni la possibilité d’être disciple. C’est une « dynamique » parce que c’est un « chemin » continu à un « devenir », afin que Jésus « devienne » dans le disciple, jusqu’à ce que ce dernier parvienne à l’état d’homme parfait, dans la mesure qui convient à la pleine maturité du Christ (Ephésiens 4, 13), comme l’explique de manière stupéfiante Saint Paul. Dans l’Evangile, nous trouvons les paroles lapidaires du Christ : « Si vous ne vous convertissez pas, et si vous ne devenez pas comme de petits enfants, vous n’entrerez pas dans le Royaume des Cieux » (Matthieu 18, 3). C’est là le « devenir » des Saints, qui sont les disciples par excellence du Seigneur ! Ils ont compris que l’homme parfait croît seulement si meurt le vieil homme, et vice versa. Dans cette lutte entre les deux, il ne peut y avoir qu’un vainqueur : l’égoïsme, qui est la dynamique du vieil homme, ou la charité qui est la dynamique de l’homme nouveau. Les deux dynamiques ne peuvent coexister. L’égoïsme en effet ne laisse pas de place à la charité, et cette dernière, à son tour, dans l’âme qui se renie elle-même, se répand aux dépens de l’amour propre, en vainquant les résistances elle ouvre le cœur à la liberté : la liberté de la charité, la liberté de l’homme libéré par le Christ, racheté par Son Amour. Jean Baptiste décrit la dynamique de l’homme nouveau, quand il déclare : « Il doit croître et moi je dois disparaître ». En d’autres termes, si nous voulons faire croître la grâce du Christ en nous, c’est-à-dire la charité de Dieu, nous devons renoncer à nous-mêmes ! Au fond, la dynamique du renoncement est conséquente, elle est logique : comment puis-je parvenir à me libérer de moi-même si je continue à me posséder ? Je ne puis pas me libérer de mes ambitions si ce n’est en y renonçant, et, plus elles frappent à la porte, plus je devrai les repousser. Si je ne le fais pas, je succombe à elles, et je perds Jésus, qui me veut libre pour me remplir de Lui ! Plus nous aimerons l’homme nouveau, et plus nous oublierons le vieil homme, avec son désir de paraître, de valoir, de pouvoir…
C’est en ces termes précisément que Saint Paul enseigne dans Lettre aux Ephésiens : « Mais vous, ce n’est pas ainsi que vous avez appris à connaître le Christ, si du moins vous l’avez reçu dans une prédication et un enseignement conformes à la Vérité qui est en Jésus, à savoir qu’il faut abandonner votre premier genre de vie et dépouiller le vieil homme, qui va se corrompant au fil des convoitises décevantes, pour vous renouveler par une transformation spirituelle de votre jugement et revêtir l’Homme nouveau, qui a été créé selon Dieu, dans la justice et la sainteté de la Vérité » (Ephésiens, 4, 20-25). Jésus va à la rencontre de chacun pour le revêtir de Lui-même, de Ses vertus, pour le transformer en créature nouvelle, en la créature vraie qu’elle est destinée à devenir. Au fond, l’homme nouveau, c’est Jésus en nous, alors que le vieil homme est le « moi » qui se passe de Dieu, le « moi » trompeur, le faussaire ! Combien est fausse, en effet la perception de ce vieil homme, combien est falsifiée la perspective de son « moi » fermé sur lui-même ; la vision de la réalité est totalement différente de celle de l’homme nouveau. Il suffit de penser à la mort ! Combien est opposée la vision des deux : l’homme nouveau la voit comme un passage, un saut définitif dans l’éternité, alors que l’autre, le vieil homme, fait mine de ne pas la voir, il l’ignore, il la renvoie, comme si elle ne le concernait pas. Faussée par son propre « moi », la réalité des choses est tout autre chose que ce qu’elle est devant Dieu. La logique de l’égoïsme, du « moi » fermé sui lui-même, qui n’est pas libéré par Dieu, fausse la perception de la réalité. Dieu nous a créés pour Lui-même, il nous a créés pour le bonheur éternel, il a mis en nous une intelligence, une raison qui est destinée, réellement, à la pleine communion avec Son Intelligence, avec Sa Raison, avec Son Amour ! Mais, le vieil homme ne voit pas tout cela, il ne voit pas Dieu, parce qu’il voit seulement son propre horizon limité. Il nous vient à l’esprit le miracle de l’aveugle de Bethsaïde, qui est guéri par Jésus. Il le prit par la main, le conduit en dehors du village, lui mit de la salive sur les yeux, lui imposa les mains une première et une seconde fois, et il le guérit ainsi. L’évangéliste Marc dit, à la fin, à propos du pauvre aveugle : « Il fut guéri, et il voyait tout nettement de loin » (cf. Marc 8, 22-26). C’est ce qui se passe dans la conversion : il faut se laisser prendre par la main par Jésus, sortir de soi-même, se faite toucher par Sa Présence qui guérit, qui rend nouvelles les créatures, avec les yeux ouverts pour voir « les choses de loin », à la lumière de Dieu !