1. Pour aujourd'hui, nous avons choisi le thème de la « paternité et de la maternité responsables » à la lumière de la Constitution Gaudium et Spes et de l'Encyclique Humanæ vitæ. Dans l'examen du sujet, la Constitution conciliaire se limite à rappeler les principes fondamentaux; en revanche le document pontifical va au-delà, leur donnant un contenu plus concret. Voici ce que dit le texte conciliaire : « ... Lorsqu'il s'agit de mettre en accord l'amour conjugal avec la transmission responsable de la vie, la moralité du comportement ne dépend donc pas de la seule sincérité de l'intention et de la seule appréciation des motifs; mais elle doit être déterminée selon les critères objectifs, tirés de la nature même de la personne et de ses actes, critères qui respectent, dans un contexte d'amour véritable, la signification d'un don réciproque et d'une procréation à la mesure de l'homme; chose impossible si la vertu de chasteté conjugale n'est pas pratiquée d'un cœur loyal. » (Gaudium et spes, 51, § 3.) Et le Concile ajoute : « En ce qui concerne la régulation des naissances, il n'est pas permis aux enfants de l'Église, fidèles à ces principes, d'emprunter des voies que le magistère désapprouve. » (Gaudium et spes, 51, § 3.)
2. Avant le passage cité (cf. GS 50), le Concile enseigne que les époux doivent « s'acquitter de leur charge en toute responsabilité humaine et chrétienne et dans un respect plein de docilité à l'égard de Dieu » (Gaudium et spes, 50, § 2). Ce qui veut dire que « d'un commun accord et d'un commun effort, ils se formeront un jugement droit : ils prendront en considération à la fois et leur bien et celui des enfants déjà nés ou à naître; ils discerneront les conditions aussi bien matérielles que spirituelles de leur époque et de leur situation ; ils tiendront compte enfin du bien de la communauté familiale, des besoins de la société temporelle et de l'Église elle-même » (Gaudium et spes, 50). Suivent des paroles particulièrement importantes pour déterminer avec une plus grande précision le caractère moral de la « paternité et de la maternité responsables ». Nous lisons : « Ce jugement, ce sont en dernier ressort les époux eux-mêmes qui doivent l'arrêter devant Dieu. » (Gaudium et spes, 50.) Et le texte poursuit : « Dans leur manière d'agir, que les époux chrétiens sachent bien qu'ils ne peuvent pas se conduire à leur guise, mais qu'ils ont l'obligation de toujours suivre leur conscience, une conscience qui doit se conformer à la Loi Divine; et qu'ils demeurent dociles au magistère de l'Église, interprète autorisé de cette Loi à la lumière de l'Évangile. Cette Loi Divine manifeste la pleine signification de l'amour conjugal, elle le protège et le conduit à son achèvement vraiment humain. » (Gaudium et spes, 50.)
3. En se limitant à rappeler les conditions nécessaires de la « paternité et de la maternité responsables », la Constitution conciliaire les a relevées de manière univoque en précisant les éléments qui constituent cette paternité et maternité, c'est-à-dire le jugement mûr de la conscience personnelle conforme à la loi divine, authentiquement interprétée par le magistère de l'Église.
4. L'Encyclique Humanæ vitæ, en se basant sur les mêmes principes et conditions et en allant plus loin, offre des indications concrètes. On s'en rend immédiatement compte devant la manière de définir la « paternité responsable » (Humanæ vitæ, 10). Paul VI s'efforce de préciser ce concept en recourant à ses différents aspects et en éliminant d'avance sa réduction à un des aspects « partiels », comme le font ceux qui parlent uniquement de contrôle des naissances. En effet, dès le début, c'est une conception intégrale de l'homme (cf. Humanæ vitæ, 7) et de l'amour conjugal (cf. Ibid 8 ; 9) qui guide Paul VI dans son argumentation.
5. On peut, pour parler de responsabilité dans l'exercice de la fonction paternelle et maternelle, la considérer sous divers aspects. C'est ainsi que Paul VI écrit : « Par rapport aux processus biologiques, paternité responsable signifie connaissance et respect de leurs fonctions ; l'intelligence découvre dans le pouvoir de donner la vie des lois biologiques qui font partie de la personne humaine. » (Humanæ vitæ, 10.) Puis, quand il s'agit de la dimension psychologique des « tendances de l'instinct et des passions, la paternité responsable signifie la nécessaire maîtrise que la raison et la volonté doivent exercer sur elles » (Ibid. 10). En considérant les aspects interpersonnels mentionnés ci-dessus et en y joignant « les conditions économiques et sociales », il faut reconnaître que « la paternité responsable s'exerce en vertu soit d'une délibération pondérée et généreuse, soit d'une décision - prise pour de graves motifs et respectueuse de la loi morale - d'éviter temporairement et également, pour un temps indéterminé, une nouvelle naissance » (Humanæ vitæ, 10). Il en résulte que, dans le concept de « paternité responsable », est contenue la décision non seulement d'éviter « une nouvelle naissance », mais aussi de faire croître la famille selon des critères de prudence. Sous cette lumière, dans laquelle il faut examiner et résoudre la question de « la paternité responsable », reste toujours fondamental « l'ordre moral objectif que Dieu a établi et dont la conscience droite est toujours la fidèle interprète ». (Humanæ vitæ, 10.)
6. C'est dans ce cadre que les époux doivent accomplir « leurs propres devoirs envers Dieu, envers eux-mêmes, envers la famille et envers la société, selon une juste hiérarchie des valeurs » (Humanæ vitæ, 10). On ne saurait donc parler ici « d'agir selon son propre arbitre ». Au contraire, les époux doivent « conformer leur conduite aux intentions créatrices de Dieu ». (Ibid, 10.) A partir de ce principe, l'encyclique base son argumentation sur la « structure intime de l'acte conjugal » et sur la « connexion inséparable des deux significations de l'acte conjugal » (cf. Humanæ vitæ, 12); nous en avons déjà fait état précédemment. Le principe relatif à la morale conjugale est donc la fidélité au plan divin manifesté dans « l'intime structure de l'acte conjugal » et dans « la connexion inséparable des deux significations de l'acte conjugal ».
Audience générale de Jean-Paul II, le 1er août 1984 (DC 1984 p. 888)