Depuis Vatican II, on parle souvent des possibilités d’ « adaptation » de la liturgie. Et au nom de cette « adaptation », beaucoup, au cours des Messes, se permettent de changer les paroles et les rites de la célébration, ce qui est contraire aux enseignements du Concile dont ils se réclament. Cette façon illégitime de modifier les rites est d’ailleurs devenue tellement habituelle - y compris chez les évêques, comme le faisait remarquer Benoît XVI - que rares sont les fidèles qui la remarquent et s’en offusquent. Mais si d’un côté le Concile et l’actuel Missel romain disent qu’il n’est permis à personne d’ajouter, d’enlever, de modifier quoi que ce soit dans la liturgie, et si d’un autre côté le même Concile et le même Missel admettent l’idée d’ « adaptation », n’est-ce pas qu’il y a contradiction ? Voyons ce qu’il faut entendre - et ce qu’entend l’Eglise - par « adaptation ».
La liturgie nous est donnée par l’Eglise : elle n’est ni ce que nous croyons qu’elle est ni ce que nous aimerions qu’elle soit. Cette affirmation relève de l’enseignement constant de l’Eglise. Il faut donc la mettre en œuvre telle qu’elle est, telle qu’elle nous est transmise, en veillant à ce que tout soit accompli comme il faut l’accomplir. Mais en certains endroit, on ne peut pas tout faire, faute de moyens. Le missionnaire qui célèbre l’Eucharistie pascale en pleine Amazonie ne peut pas demander aux habitants d’un village isolé de chanter l’introït « Resurrexi »... C’est évident. Alors on « adapte » : on part de ce qu’il faudrait faire, et on fait ce qu’on peut faire. Telle est la véritable « adaptation », la seule qui ait un sens en liturgie. L’ « adaptation », au vrai sens du terme, consiste donc à partir de la liturgie idéale, totale, et de laisser de côté ce que, pour des raisons pratiques, évidentes, on ne peut pas faire. Or, aujourd’hui, on fait généralement tout le contraire : on part du minimum liturgique et on ajoute ou on conserve des éléments en fonction de goûts subjectifs. Ce principe de l’ « adaptation » est très clairement explicité dans la Lettre « Dominicae Cenae » de Jean-Paul II : « La subordination du ministre, du célébrant, au « Mysterium » qui lui a été confié par l’Eglise pour le bien de tout le peuple de Dieu, doit aussi trouver son expression dans l’observation des exigences liturgiques relatives à la célébration du Saint Sacrifice. Ces exigences portent, par exemple, sur l’habit, et en particulier sur les ornements que revêt le célébrant. Il est naturel qu'il y ait eu et qu’il y ait des circonstances dans lesquelles les prescriptions n’obligent pas. Nous avons lu avec émotion, dans des livres écrits par des prêtres qui avaient été prisonniers dans des camps d’extermination, des relations de célébrations eucharistiques faites sans suivre ces règles, c’est-à-dire sans autel et sans ornements. Si, en de telles conditions, cela était une preuve d’héroïsme et devait susciter une profonde estime, dans des conditions normales toutefois, négliger les prescriptions liturgiques peut être interprété comme un manque de respect envers l’Eucharistie, éventuellement dicté par l'individualisme ou par un défaut de sens critique au sujet des opinions courantes, ou par un certain manque d'esprit de foi. »
Pro Liturgia