L' "Eglise-qui-est-en-France" nous donne trop souvent l'impression d'être encore dirigée par un épiscopat dont une majorité de membres sont "paumés" : ils semblent naviguer à vue en cherchant vainement à sortir de cet épais brouillard que des années d'expériences désastreuses (en catéchèse et en liturgie essentiellement) ont fait tomber sur leur pastorale. Ces évêques qui naviguent à vue sont davantage pitoyable encore quand, prisonniers d'une vision soixante-huitarde des choses (à la façon d'un Hans Küng définitivement dépassé) ils poursuivent des expériences ou font des déclarations qui achèvent de ruiner l'Eglise, les diocèses, les paroisses et, ce qui est gravissime, la confiance que devraient avoir les fidèles en la foi catholique.
Oui, de tels évêques se font les promoteurs de la crise lorsqu'ils gardent le silence devant des liturgies systématiquement sabotées : messes dansées par un vicaire épiscopal, messes concélébrées avec une pasteur protestante, messes célébrées de façon négligée, messes célébrées dans l'ignorance des règles données par le missel romain, messes célébrées sur fond de chansonnettes qui sont au chant sacré ce que "la danse des canards" est à une cantate de Bach, messes célébrées dans des salles de fêtes alors qu'on dispose d'une cathédrale, messes célébrées au milieu de jongleries, messes célébrées par des prêtres déguisés en clowns, messes célébrées par des prêtres obligés d'obéir aux ordres de laïcs membres d'une véritable Stasi liturgique... etc. Une telle situation inacceptable nous invite à reprendre la méditation que faisait, en 2005, le Cardinal Ratzinger au Chemin de Croix du Colisée : « Que peut nous dire la troisième chute de Jésus sous le poids de la croix ? Peut-être nous fait-elle penser plus généralement à la chute de l'homme, au fait que beaucoup s'éloignent du Christ, dans une dérive vers un sécularisme sans Dieu. Mais ne devons-nous pas penser également à ce que le Christ doit souffrir dans son Église elle-même ? Combien de fois abusons-nous du Saint-Sacrement de sa présence, dans quel coeur vide et mauvais entre-t-il souvent! Combien de fois ne célébrons-nous que nous-mêmes, et ne prenons-nous même pas conscience de sa présence! Combien de fois sa Parole est-elle déformée et galvaudée ! Quel manque de foi dans de très nombreuses théories, combien de paroles creuses ! Que de souillures dans l'Eglise, et particulièrement parmi ceux qui, dans le sacerdoce, devraient lui appartenir totalement! Combien d'orgueil et d'autosuffisance ! Que de manques d'attention au sacrement de la réconciliation, où le Christ nous attend pour nous relever de nos chutes ! Tout cela est présent dans sa passion. La trahison des disciples, la réception indigne de son Corps et de son Sang sont certainement les plus grandes souffrances du Rédempteur, celles qui lui transpercent le coeur. Il ne nous reste plus qu'à lui adresser, du plus profond de notre âme, ce cri : Kyrie, eleison - Seigneur, sauve-nous (cf. Mt 8,25). Souvent, Seigneur, ton Eglise nous semble une barque prête à couler, une barque qui prend l'eau de toute part. Et dans ton champ, nous voyons plus d'ivraie que de bon grain. Les vêtements et le visage si sales de ton Eglise nous effraient. Mais c'est nous-mêmes qui les salissons ! C'est nous-mêmes qui te trahissons chaque fois, après toutes nos belles paroles et nos beaux gestes. Prends pitié de ton Eglise: en elle aussi, Adam chute toujours de nouveau. Par notre chute, nous te traînons à terre, et Satan s'en réjouit, parce qu'il espère que tu ne pourras plus te relever de cette chute; il espère que toi, ayant été entraîné dans la chute de ton Eglise, tu resteras à terre, vaincu. Mais toi, tu te relèveras. Tu t'es relevé, tu es ressuscité et tu peux aussi nous relever. Sauve ton Eglise et sanctifie-la. Sauve-nous tous et sanctifie-nous ».
Pro Liturgia