« Sommes une jeunesse, Messieurs ! Sommes la jeunesse de Dieu. La jeunesse de la fidélité ! Et cette jeunesse veut préserver pour elle et pour ses fils, la créance humaine, la liberté de l'homme intérieur... » (Charette)

La souffrance d’un séminariste…

Un des grands drames aujourd’hui pour les vocations sacerdotales en France est l’état catastrophique de certains Séminaires "diocésains" qui rebutent bien souvent, il faut le dire, de très nombreux garçons désireux d’offrir leur vie au Seigneur. Ci-dessous, un extrait d’une lettre d’un séminariste ayant subi une véritable « rééducation » dans un Séminaire français (il écrit à un de ses anciens amis). Grâce à Dieu, ce dernier a réussi à survivre en se "raccrochant" à un Séminaire Ecclesia Dei. Ne soyons pas naïfs : un jeune garçon qui se sent appelé à la prêtrise et qui se veut « fidèle à Rome » doit absolument avoir avec lui une très forte personnalité pour ne pas se laisser "déformer" par les très progressistes et anti-romains séminaires français. Certains séminaristes diocésains "romains" arriveront peut-être à "passer" les années mais au prix d’énormes sacrifices...

 

 


seminaristeMon cher Jean,

 

Plusieurs mois se sont écoulés depuis mon départ et je trouve enfin un peu de temps pour répondre à tes nombreux courriers "inquiets". Je m'en vais te donner des nouvelles et quelques-unes des raisons pour lesquelles je suis entré au séminaire Ecclesia Dei ***. La vie du séminaire est bien réglée. Les cours sont très intéressants. Cette première année, correspond à l’année dite de propédeutique des séminaires diocésains. Elle est une initiation de tout ce que nous ferons pendant ces six autres de formation : philosophie thomiste, théologie, droit canonique, histoire de l'Église, études des textes pontificaux et d'autres matières encore sans oublier tu t'en doutes... le latin. Tu n'imagines pas comment l'orthodoxie de l'enseignement est reposante pour l'esprit. Vois-tu, je n'ai plus à me "méfier" de ce que j'apprends. Rien d' ''exceptionnel" mais l'enseignement vrai, constant de l'Église qui ne peut pas vieillir. Christ le même hier, aujourd'hui et demain ! Rahner est un peu délaissé je te l'avoue... Je repense souvent à notre discussion avec le Père N. où vous me disiez peu avant mon départ, que je choisissais la facilité ! Je m'aperçois aujourd'hui à quel point cette mise en garde n'est pas juste. Tu sais ça n'a pas été facile de quitter le diocèse et d'annoncer aux parents que je rentrais dans un séminaire "tradi". Ce mot "tradi" ne veut d'ailleurs rien dire et ne sert à rien d'autre qu'à exclure.

 

Je souris souvent en pensant qu'il a suffi que je parle de Communauté Ecclesia Dei *** pour qu'on me propose d'aller étudier à Rome au Séminaire français. Si j'avais su, j'aurais donné le tuyau à Jérôme qui lui, n'a pas eu cette "écoute" et qui, après cinq années de "rééducation" a été jeté parce qu'il n'avait décidément pas le "profil". Quel gâchis ! Je ne juge personne mais personnellement, j'aurais eu un vrai problème de confiance en entrant pour le diocèse. Regarde Quentin, lui qui était déjà grande gueule aux scouts, n'arrêtait pas de nous dire qu'avec lui, on allait enfin voir ce que l'on allait voir ! Ses dernières déconvenues lui ont enfin fait comprendre que le Code de Droit canonique ne fait pas tout... et que des textes à la réalité pratico-pratique d'abord au séminaire et surtout après en paroisse... il y avait un monde ! Lui qui affirmait qu'il porterait la soutane parce-que-personne-même-pas-l'évêque-n'avait-le-droit-de-me-l'interdire" ose à peine porter le clergy ! Non vraiment je ne regrette pas d'avoir renoncé à la "voie médiane" que l'on me proposait au séminaire diocésain *** où j'aurais comme les copains dû sans cesse tricher et ne jamais avouer ce à quoi j'adhérais et chaque jour faire semblant d'être ce que je ne voulais pas "être".

 

Ne crois pas que je renie ces personnes qui d'une manière ou d'une autre m'ont conduit au séminaire. Je sais que ça peut surprendre que je sois ici (je ne distribue plus la communion si tu veux tout savoir) mais je me rends compte que l'univers "si ouvert" dans lequel j'ai grandi et si persuadé d'être "à l'écoute" était incapable de comprendre ma démarche. Je n'ai pourtant pas changé de religion ! Beaucoup de mes confrères ici ont un parcours semblable tu sais. L'esprit de famille qui règne ici est très "structurant" comme dirait notre vicaire général mais ici c'est vrai. On ne te met pas dans un moule, on ne te dit pas ce que tu dois penser pour arriver. J'apprends les vérités éternelles, c'est tout. La place des supérieurs est paternelle sans proximité déplacée. Pas de familiarité débile non plus entre nous. En fait tout est à sa place ! La liturgie est soignée. Mais ici, chaque jour, au chœur, je comprends que la liturgie est la propriété de l'Église et pas celle des prêtres. C'est beaucoup plus qu'une affaire de langue tu sais. Les prêtres ne peuvent pas faire ce qu'ils veulent, ils ne sont pas propriétaires mais dépositaires de ce trésor sacré. Je l'ai dit au Père N. en lui parlant du très curieux rassemblement de la Pentecôte que l'on a subi dernièrement. Du début à la fin tout a été réécrit, (ils l'ont d'ailleurs dit lors des remerciements interminables.) C'était surréaliste ! Réponse du Père, (siégeant au conseil épiscopal !), "qu'est-ce que tu veux que j'y fasse ?". Et bien tu vois à mon âge, on rêve d'autres choses, et ce que moi je peux faire c'est de me former correctement loin des innovations de tout poil, me former selon ce qu'a prévu l'Église. Je n'ai pas envie de faire semblant, de supporter des liturgies débilitantes, de m'habiller comme un clown, d'étudier des théologiens sopos mais qu'il faut aimer parce que c'est tendance... Relis les textes conciliaires sur l'enseignement dans les séminaires, le chant liturgique, le droit canonique (qui ne sert pas qu'à interdire les mariages dans certains endroits célébrés par certains prêtres si tu vois ce que je veux dire).

 

Je veux être prêtre, et suivre Jésus-Christ, c'est tout. Prie pour moi.

 

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A
Vous êtes parti pour ne plus avoir à vous "méfier de ce qu'on apprend". Ce n'était pas une posture confortable, certes : pour apprendre il faut avoir confiance dans ses maîtres et dans ce qu'ils transmettent. Pourtant que vaudrait une formation qui ne serait constituée que par le glissement harmonieux de leçons prédigérées par la tradition ? A chaque fois, l'être qui s'ouvre à la grâce d'apprendre accepte de prendre des risques puisqu'il engage sa liberté. "J'apprends des vérités éternelles, c'est tout", avez-vous écrit. Mais comment les apprenez-vous ? Une lente maturation, une réflexion, une adaptation à ce que vous êtes et ce qu'il vous est possible de recevoir. Rien ne se fait en un jour, la vérité que nous souhaitons tous accueillir ne se donne pas dans des formules. C'est peut-être regrettable, vous semblez tant désireux d'apprendre et de donner à votre tour. Nous vous remercions de votre engagement pour la foi, nous avons besoin de prêtres solides et saints, nous vous accepterons aussi les jours où vous douterez, les jours où ce sera plus ardu. Les communautés de croyants vous soutiendront, les baptisés sont tous dépositaires du trésor sacré. <br /> Si vous êtes une personne réelle et pas un être de papier inventé pour les besoins du blog, je serais heureuse dialoguer avec vous.<br /> AMR, docteur en Sciences de l'Education
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O
Formidable, ce témoignage ! <br /> Du courage! mon confrère à la suite du Seigneur !
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