Dans "La liturgie, mystère du salut", un livret d'une soixantaine de pages publié en italien par les éditions San Paolo de Milan et en français par les éditions Artège de Perpignan, Mgr Guido Marini, Maître des cérémonies pontificales du pape, revient sur 5 points qui touchent directement à la célébration de la messe : la liturgie sacrée, l'orientation de la prière, l'adoration et l'union à Dieu, la participation active, la musique sacrée ou liturgique. Celles et ceux qui lisent les publications de Pro Liturgia n'apprendront probablement rien de neuf en parcourant les lignes de Mgr Marini. Il est cependant intéressant - et surtout réconfortant - de constater qu'aujourd'hui, ce ne sont plus seulement des association comme la nôtre qui dénoncent des liturgies peu conformes à ce que Vatican II a vraiment voulu, mais aussi des prélats, des évêques, des cardinaux, le pape..
Dans le chapitre 1, Mgr Marini insiste sur le caractère "sacré" de la liturgie. Prenant appui sur le sens de la liturgie qu'ont les Orientaux et citant le Cardinal Ratzinger, l'Auteur souligne qu'il est nécessaire de souligner l' "objectivité du rite liturgique" et, reprenant les termes de l'ex-Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, rappelle qu' "affirmer le caractère sacré de la liturgie a pour conséquence de souligner le fait qu'elle ne se nourrit pas d'inventions passagères et de trouvailles toujours plus innovantes de quelques individus ou groupes." Dans le chapitre 2, le Maître des cérémonies du Saint-Père aborde la question de "l'orientation de la prière liturgique". Rappelant que le fait de se "tourner tous ensemble vers le Seigneur" - prêtre et fidèles laïcs - au cours d'une célébration liturgique, est "une attitude extérieure qui manifeste une attitude spirituelle correcte", Mgr Marini redit combien il est capital de tout faire pour que, à la messe, ce ne soit pas le célébrant qui apparaisse comme important, mais le Seigneur : "La vue, en vérité, est obscurcie et empêchée si les yeux demeurent fixés sur ce qui est seulement présence de l'homme et de son oeuvre." D'où l'urgence de rappeler aux prêtres qu'ils ont à s'effacer au cours des célébrations, afin de laisser l'attention des fidèles se porter librement sur Celui que l'on célèbre. D'où aussi le fait qu'il est "tout à fait légitime de célébrer la messe [dans sa forme "ordinaire"] sur les anciens autels lorsque les caractéristiques architecturales et artistiques de nos églises le permettent", la messe "face au peuple" ne devant pas être tolérée dès lors qu'on cherche à la justifier à l'aide d'une quelconque théologie. Le chapitre 3 permet à l'Auteur d'insister sur l' "adoration", laquelle, il faut le reconnaître, a été rendue difficile dans les messes bavardes et agitées que nous avons souvent à subir dans nos paroisses. Jean-Paul II a enseigné que "dans l'événement pascal et dans l'Eucharistie qui l'actualise au cours des siècles, il y a un "contenu" vraiment énorme dans lequel est présente toute l'histoire en tant que destinataire de la grâce de la rédemption. Cette admiration doit toujours pénétrer l'Eglise qui se recueille dans la célébration eucharistique." Mgr Marini rebondit sur ces lignes pour rappeler que ce sont la beauté, la noblesse et l'harmonie imprégnant la liturgie qui conduisent à l'adoration et à l'union avec Dieu : "Dans la liturgie en général, et dans la liturgie eucharistique en particulier, tout [la musique, les chants, le silence, la manière de proclamer la Parole de Dieu, les vêtements liturgiques, les objets du culte, l'espace liturgique lui-même] doit être centré sur l'adoration, et tout le déroulement des rites doit aider à entrer dans l'adoration que l'Eglise fait de son Seigneur." Au chapitre 4, il est question de la "participation active". Une notion très mal comprise depuis Vatican II puisque l'expression "participatio actuosa" qui figure dans la Constitution conciliaire sur la liturgie a été mal traduite en français par "participation active". Mgr Marini rappelle qu'on "participe activement" lorsqu'on accomplit sa fonction propre - et uniquement sa fonction propre ! - au cours de la célébration liturgique, lorsqu'on suit avec attention ce qui se fait à l'autel, lorsqu'on veille à acquérir une meilleure compréhension de la Parole de Dieu, des prières et des rites, lorsqu'on unit sa voix à celle des autres dans le chant qui revient à l'assemblée... etc. "Mais tout ceci n'est cependant en rien une participation active si cela ne conduit pas à l'adoration" du Christ présent sur l'autel. Et l'Auteur de souligner que la véritable "participation active" n'est pas dans ce qui consiste à rendre immédiatement le plus de choses possibles directement compréhensibles au cours d'une célébration, puisque l'entrée dans le mystère de Dieu se fait aussi par ce qui touche le coeur. Le chapitre 5, le dernier donc, aborde la question de la musique. Evoquant les enseignements du Concile de Trente intégrés dans ceux du Concile Vatican II, Mgr Marini rappelle que "la musique sacrée n'est en aucun cas l'expression d'une pure subjectivité [mais qu'elle] doit être enracinée et s'appuyer sur les textes de l'Ecriture ou de la Tradition, afin de les célébrer et de les communiquer." Voilà pourquoi l'Eglise a toujours cherché à établir une claire distinction entre la musique sacrée et le chant liturgique - celui qui conduit à dilater la Parole de Dieu -, et les autres formes musicales. Sale temps pour les compositeurs - dont nous ne citerons pas les noms ici - qui ont manoeuvré pour que les prêtres et les équipes liturgiques farcissent les célébrations de leurs chants portant à la désacralisation !
Mgr Marini termine son exposé par des paroles que nous ne pouvons que faire pleinement nôtres : "Depuis quelques années se font entendre dans l'Eglise des voix qui en appellent à un nouveau mouvement liturgique, à un mouvement en partie analogue à celui qui posa les bases du second concile du Vatican et qui soit capable d'accomplir la "réforme de la réforme", de faire faire un pas de plus dans la compréhension de l'authentique esprit de la liturgie et de sa célébration. Peut-être réalisera-t-il ainsi la réforme providentielle de la liturgie que les pères conciliaires avaient appelée mais qui, dans sa réalisation, n'a pas toujours été heureuse. Il est certain que tous doivent participer à ce nouveau mouvement liturgique, à commencer par les prêtres. Puissent, avec l'aide du Seigneur et la Très Sainte Vierge Marie, les développements ultérieurs de la réforme être le fruit de notre amour sincère pour la liturgie dans la fidélité à l'Eglise et au Pape."
Mgr Guido MARINI, La liturgie, mystère du salut, Ed. Artège, Perpignan, 2010, 65 pages,
6,90 euros. Préface de Mgr Raymond Centène, Evêques de Vannes. Pro Liturgia