17 septembre 2009 4 17 /09 /septembre /2009 07:53

Dans nombre de messes paroissiales, les fidèles sont « invités » ou souvent même « forcés » à accepter des célébrations « originales », c’est-à-dire qui ne sont jamais véritablement conformes au modèle liturgique transmis par l’Eglise. Le message que renvoient ces célébrations qui se veulent « originales » peut se résumer à « il faut adapter la liturgie à la communauté locale ». Car c’est ainsi que la communauté locale - la paroisse ou le groupement paroissial - va s’affirmer : sa façon « originale » d’utiliser le Missel romain et d’organiser la Messe dominicale deviendra sa marque. Et à travers cette marque, c’est le célébrant et les membres de l’équipe d’animation liturgique locale qui pourront s’affirmer, sortir du lot et passer pour des fidèles exemplaires, « engagés ». En un mot : il pourront « vivre ».

 

 

 

Mais celles et ceux qui s’engagent dans cette voie de la recherche de l’ « originalité liturgique » par le biais de chants nouveaux, de gestes affectés, d’attitudes étudiées, d’oraisons bricolées... se font rapidement piéger. Car lorsque le but essentiel d’une liturgie eucharistique est d’être « originale », le fait de vouloir s’y montrer en fidèle « original » conduit à devoir adopter les comportements conformistes qui sont ceux de la communauté réunie pour célébrer. L’originalité qui veut se démarquer de la « tradition » devient alors rapidement le moyen d’imposer des comportements « traditionnels » : dans telle paroisse, il est devenu « traditionnel » de réciter un Credo « original » à la place du vrai Credo... En fait, ceux qui cherchent à être originaux en liturgie participent consciemment ou non à un phénomène de conformisme de masse dépourvu de toute signification véritablement liturgique. Paradoxalement, face à ce phénomène de conformisme de masse largement développé dans les paroisses, la véritable « originalité » se trouvera chez celui qui participe à une liturgie célébrée par un prêtre soucieux de mettre le Missel romain en œuvre sans y ajouter, retrancher ou modifier quoi que ce soit. La particularité de celui qui veut faire la promotion de célébrations « originales », qu’il soit prêtre ou laïc, c’est la fuite en avant obsessionnelle - et parfois désespérée - qu’il entraîne. Car son souci de se montrer « original » en donnant une touche personnelle à la liturgie devient vite un conformisme. Une nouvelle façon de traiter la liturgie n’est originale que quelques semaines... Pourquoi voit-on tant de fidèles s’engager dans l’élaboration de liturgies dominicales « originales » ? Parce que cet engagement touche à leur individualité, à leur image, à leur construction personnelle : être intégré dans une équipe d’animation liturgique au sein de laquelle ils seront invités à imaginer des pratiques liturgiques « originales » deviendra un moyen de dépasser les autres les autres fidèles. En réalité, ils entreront dans un cercle vicieux dont ils ne sortiront plus jamais : la recherche de l’originalité en liturgie deviendra une idée fixe et une Messe célébrée comme l’Eglise demande qu’elle soit célébrée ne les intéressera plus. Si dans leur paroisse arrive un prêtre qui respecte la liturgie, ces fidèles adeptes d’ « originalité » se montreront très critiques à l’encontre de leur nouveau pasteur ; et si ce dernier ne cède pas, il verra les fidèles « originaux » cesser toute pratique dominicale.

 

Le psychothérapeute Paul Watzlawick a expliqué que rester enfermé dans la « double contrainte » - celle qui consiste à vouloir une originalité qui ne puisse pas devenir une nouvelle occasion de conformisme - peut être la cause d’une névrose - dont le signe est soit la fuite en avant compulsive (du neuf, toujours du neuf !), soit au contraire le désenchantement conduisant au renoncement puis au mutisme. Le seul moyen de dépasser une « double contrainte », poursuit Paul Watzlawick, c’est de prendre du recul et de constater le caractère absurde de l’invitation à être « original ». En liturgie, cela consiste à avoir une réflexion sur le message véhiculé par les revues d’animation liturgique et les sessions pour animateurs liturgiques et à se demander : que cherche-t-on à nous faire faire ? Il y a fort à parier que celui qui prendra le temps d’analyser les messages implicites envoyés à longueurs de messes par les célébrants et les fidèles laïcs qui veulent des liturgies « originales », constatera vite qu’il est le jouet de pratiques d’autant plus stériles - et risquées pour la foi - qu’elles se contredisent toutes les unes les autres. C’est d’ailleurs ce qui avait conduit Mgr Bux à se demander - selon le titre d’un de ses ouvrages - comment il pouvait être possible de garder la foi en allant à ces messes que l’on veut « originales ».

 

Pro Liturgia

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