Dans un article publié sur le site Internet de la Conférence des Evêques de France (CEF), on lit que « la réforme liturgique a provoqué, notamment en France, des tensions entre les fidèles adoptant cette réforme et une petite minorité qui a souhaité rester attachée à l'ancien rite, presque inchangé depuis le Concile de Trente au XVIe siècle ». Une telle affirmation ne correspond pas du tout à la vérité des faits. Où les évêques ont-il vu que des fidèles ont adopté cette réforme ? Mieux : qu'on les autorise à adopter la réforme liturgique ? Quasiment nulle part. De nombreux ouvrages qui traitent de la question attestent qu'au lendemain de Vatican II, ce n'est pas une réforme qui a eu lieu, mais une dévastation de la liturgie.
Sa Sainteté le Pape Benoît XVI en la Chapelle Sixtine
Liturgie selon le Missel Romain de 2002 (forme ordinaire)
Contrairement à ce qui est affirmé sur le site de la Conférence des Evêques de France, la tension, après Vatican II, n'a pas été entre les fidèles adoptant la réforme liturgique conciliaire et les fidèles la refusant, mais bien entre des fidèles qui, soutenus par des évêques, se sont réclamés du Concile pour massacrer la liturgie et les autres fidèles qui souhaitaient vraiment mettre en oeuvre le Missel Romain approuvé par Paul VI. C'est sur cette tension-là que s'est greffé le mouvement lefebvriste qui a conduit au refus pur et simple de la liturgie actuelle; et ce mouvement n'a pu prendre de l'ampleur que parce que les fidèles qui se réclamaient du Concile ont réussi à introduire partout - ou presque - des célébrations liturgiques qui n'étaient en rien conformes à ce que Vatican II avait vraiment demandé. Le mouvement lefebvriste a pu connaître un certain succès d'abord parce que des évêques eux-mêmes ont orchestré une désacralisation de la liturgie et ont placardisé les prêtres qui souhaitaient célébrer la liturgie restaurée de façon fidèle et exemplaire. Par souci de vérité, il faut redire que c'est moins le refus de Mgr Lefebvre que la "trahison des clercs", au lendemain de Vatican II, qui a provoqué les tensions. Et tout le monde peut constater qu'aujourd'hui encore, dans les paroisses, ce sont généralement ceux qui se réclament le plus du Concile qui se montrent les plus prompts à en trahir les principes. Bien des prêtres de France - et parmi eux des évêques - se sont comportés comme des fossoyeurs de la liturgie romaine restaurée à la suite de Vatican II : ce sont eux qui ont systématiquement retourné les autels [ou supprimé le Crucifix sur l'autel si ce dernier n'est pas orienté], interdit le latin et le grégorien, liquidé les agenouilloirs, obligé à recevoir la sainte communion debout et sur la main, [« Ceux qui ont retiré les agenouilloirs dans les églises ont fait du mal à la communauté catholique. L’Eglise n’a jamais demandé ça. Rome n’a jamais demandé ça. C’est comme dans les églises où on a enlevé les bancs de communion. L’Eglise de Rome n’a jamais demandé qu’on enlève les bancs de communion » (Son Eminence le Cardinal Francis Arinze)], limité l'usage de tous les signes sacrés (encens, vêtements liturgiques), favorisé les ADAP et les absolutions collectives. Ce sont eux et personne d'autre qui ont manoeuvré pour réduire au silence les fidèles qui désapprouvaient ouvertement des façons de célébrer l'Eucharistie très éloignées du Missel Romain donné par Paul VI... Ainsi, prétendre que les "problèmes liturgiques" sont nés d'une opposition entre ceux qui acceptaient le Concile et ce qui le refusaient est une affirmation qui n'a aucun fondement. Il faut se relire "Les fumées de Satan", ouvrage publié en 1976 par André Mignot et Michel de Saint-Pierre, pour comprendre ce que fut la réalité de l'Eglise en France dans l'immédiat après-Concile et pour savoir jusqu'où a pu aller l'inertie de tout un épiscopat.
Pro Liturgia