
1. Alors je répandrai sur la maison de David,
Un esprit de grâce et de supplication. (bis)
R. Danse, danse pour ton Dieu, danse fille de Sion. (bis)
2. Alors je rendrai forte la maison de Juda,
Je les sauverai car d'eux j'ai compassion.
3. Alors exulteront les rachetés d'Adonaï,
En son nom très saint ils se glorifieront.
4. Alors tous les pays viendront à Jérusalem,
Ils seront mon peuple et je serai leur Dieu.
5. Alors je veillerai sur les remparts de Sion,
Et dans ses parvis, la joie débordera.
© Communauté du Lion de Juda et de l'Agneau Immolé (1987)
Les fidèles chrétiens ne pourront bénéficier de Liturgies dignes, belles et vraiment profondes tant que les célébrations seront présidées par des prêtres incapables d’intérioriser “l’éthos” qu’impose la Liturgie, à savoir cette manière d’être faite de dignité, d’effacement et de réserve qui seule peut faire du prêtre un “pontifex”, c’est-à-dire un “constructeur de ponts” entre Dieu et les hommes. Inutile de répéter que cette attitude est à peu près absente chez la plupart de nos célébrants, qui se trouvent alors être plus des obstacles et des empêcheurs de prier qu’autre chose… Nous autres, fidèles, sommes fatigués de se voir infliger dimanche après dimanche les personnalités envahissantes de nos clercs en mal de mise en scène. Nous sommes fatigués d’avoir à subir au cours des célébrations dominicales leurs interminables commentaires, leurs discours vides, leurs simagrées bien souvent grotesques, leurs attitudes tantôt puériles tantôt compassées, mais toujours superficielles, comme s’il y avait en eux une forme de peur-panique d’avoir à descendre jusqu’aux profondeurs de leur vie intérieure, et de réaliser à quel point celle-ci est vide...
Ce que nous demandons au clergé n’est pourtant pas bien compliqué ! Nous n’exigeons pas de nos prêtres qu’ils soient de grands saints ou de grands mystiques. Nous savons que la misère humaine est peut-être la chose au monde la mieux partagée et la mieux répartie, et que le clergé n’en est pas épargné. Non ! Nous ne leur demandons qu’une chose : qu’ils soient de vrais célébrants. Mais qu’est-ce qu’un vrai célébrant ? Le vrai célébrant est celui qui est conscient de sa propre misère, et qui par conséquent sait se taire et s’effacer derrière le rite, de peur d’infliger cette misère aux fidèles présents. Le vrai célébrant est celui qui sait que ce que l’Église a à dire est plus important que ce qu’il a lui-même à dire. C’est pourquoi il se contente de proclamer les prières prescrites par l’Église, et réserver ses prières privées pour son for intérieur. Le vrai célébrant est celui qui sait que le centre et le cœur de toute Liturgie, c’est le Christ vivant, et non sa propre personne ; c’est pourquoi il s’emploie à manifester, par sa propre manière d’être effacé et de célébrer dignement, cette “centralité” de Dieu. Le vrai célébrant est celui qui sait que la Liturgie est d’abord prière du cœur ; c’est pourquoi il s’attache à bannir tout geste, toute parole, toute attitude qui n’est pas prière, qui n’exprime pas la prière, qui ne porte pas à la prière ; Le vrai célébrant est celui qui sait que l’héritage choral, rituel, artistique et symbolique légué par la Tradition immémoriale de l’Église exprimera toujours mieux la foi que ses propres idées, inventions et créations ; c’est pourquoi il s’attache à toujours célébrer la Sainte Liturgie dans la fidélité à l’esprit et à la forme de cette Tradition vivante, sans chercher sans cesse à tout réinventer ; Le vrai célébrant est celui qui sait que la Liturgie n’est pas sa propriété mais celle de l’Église. Le vrai célébrant est aussi celui qui sait que la Liturgie exprime une foi objective et universelle, que certes elle doit toucher les cœurs mais qu’elle n’est pas un “attrape-nigaud” conçue pour attirer les fidèles ; par conséquent il se garde bien d’introduire dans la célébration tout ce qui se rattache à des modes passagères, peut-être provisoirement populaires mais toujours mondaines et superficielles.
Bref, un vrai célébrant, c’est un prêtre qui, stable sur le plan émotionnel et psychologique, se sait pécheur ; et qui non seulement se sait pauvre, mais qui, en fils de l’Église et ministre de cette même Église, sait que le remède au péché, c’est le Christ, donné aux hommes par l’Église à travers la Sainte Liturgie. Voilà ce que nous attendons de nos prêtres ! Voilà ce qu’ils devraient être et comment ils devraient apparaître lorsqu’ils accèdent à l’autel du Seigneur.
Pro Liturgia
Analogue à la Séquence Liturgique du « Stabat Mater dolorosa », le « Stabat Mater speciosa » décrit les joies de la Vierge Marie dans l'étable de Bethléem, d'après le récit évangélique. Pratiquement oublié dès la fin du XVème siècle, le texte n'est redécouvert qu'à la moitié du XIXème siècle par l'historien catholique français Antoine-Frédéric Ozanam. A méditer pendant le Temps de Noël !
1. Stabat Mater speciosa * Iuxta foenum gaudiosa * Dum iacebat parvulus
La Mère merveilleuse * Se tenait, joyeuse, dans la crèche * Où dormait son enfant
2. Cuius animam gaudentem * Laetabundam et ferventem * Pertransivit iubilus
De son âme festive * Dansante et joyeuse * Vint un chant de réjouissance
3. O quam laeta et beata * Fuit illa immaculata * Mater unigeniti !
Ô combien radieuse et bénie * Était l’immaculée, * Mère du Fils Unique !
4. Quae gaudebat et ridebat, * Exultabat cum videbat * Nati partum incliti
Ô combien heureuse, réjouie * Et exultante était-elle observant * La naissance de son divin fils
5. Quis est, qui non gauderet, * Christi Matrem si videret * In tanto solacio ?
Qui ne se pavoiserait * S’il voyait la Mère du Christ * Dans un tel confort ?
6. Quis non posset collaetari, * Piam Matrem contemplari * Ludentem cum Filio ?
Qui ne se réjouirait aussi * À voir la Mère du Christ * Ainsi jouer avec son Fils ?
7. Pro peccatis suae gentis * Vidit Iesum cum iumentis, * Et algori subditum.
Pour les péchés de Son peuple * Parmi les bêtes du fardeau elle a vu * Jésus, soumis à l’austérité.
8. Vidit suum dulcem natum * Vagientum adoratum * Vili diversorio
Elle a vu sa douce progéniture * Adorée, pleurant, * Langée dans de vils bandages
9. Nati Christus in praesepe * Coeli cives canunt laete * Cum immenso gaudio
Pour le Christ nouveau-né dans sa crèche * Les anges chantent gaiement * Dans une grande réjouissance
10. Stabat senex cum puella * Non cum verbo nec loquela * Stupescentes cordibus
Le vieil homme se tenait avec sa jeune épouse * Sans mot dire, son cœur empli * De merveilles indicibles.
11. Eia Mater, fons amoris * Me sentire vim ardoris * Fac, ut tecum sentiam
Ô Mère, fontaine d’amour, * Faites-moi ressentir votre ardeur * Laissez-moi la partager avec vous.
12. Fac, ut ardeat cor meum * In amando Christum Deum * Ut sibi complaceam
Embrasez mon cœur * De l’amour du Seigneur Dieu * Puis-je trouver la grâce à ses yeux
13. Sancta Mater, istud agas, * Pone nostro ducas plagas * Cordi fixas valide.
Sainte Mère, ne soyez pas sévère * Car vos souffrances * Sont fixées aux tréfonds de mon cœur.
14. Tui nati coelo lapsi, * Iam dignati foeno nasci, * Poenas mecum divide.
En compagnie de votre divin enfant * Laissez-moi prendre part * À la pénitence qu’il daigne supporter
15. Fac me tecum congaudere * Iesulino cohaerere * Donec ego vixero
Laissez-moi me réjouir avec vous, * Partager l’adoration de Jésus * Aussi longtemps que je vivrai
16. In me sistat ardor tui * Puerino fac me frui * Dum sum in exilio
Puisse votre ardeur m’emplir * Puisse l’enfant être refuge * Dans mon exil
17. Hunc ardorem fac communem, * Ne me facias immunem, * Ab hoc desiderio.
Entraînez-moi dans cette ardeur * Faites que je ne tourne pas le dos * À son désir.
18. Virgo virginum praeclara, * Mihi iam non sis amara * Fac me parvum rapere
Vierge des vierges, la plus élevée d’entre toutes, * Ne soyez pas amère envers moi, * Laissez-moi prendre l’enfant dans mes bras
19. Fac, ut portem pulchrum fortem * Qui nascendo vicit mortem, * Volens vitam tradere.
Puis-je en lui puiser la force, * Lui qui par sa naissance conquiert la mort * Et donne la vie.
20. Fac me tecum satiari, * Nato tuo inebriari, * Stans inter tripudia
Puis-je avec vous être comblé, * Enivré de votre Nouveau-Né * Sous de bons auspices
21. Inflammatus et accensus * Obstupescit omnis sensus * Tali de commercio.
Ainsi enflammé du feu de l’amour * Les sentiments sont tus * Par le souffle de l’altruisme
22. Fac me nato custodiri * Verbo Christi praemuniri * Conservari gratia
Puisse le Premier-Né me protéger, * Et les mots du Christ me soutenir * Puisse sa bénédiction me sauver
23. Quando corpus morietur, * Fac, ut animae donetur * Tui nati vis
Lorsque mon corps s’éteindra * Laissez mon esprit accéder * À la vision de votre Premier-Né.
Lien : Splendide article sur l'Abbé Hyvernat pour ses 20 ans de vie céleste, par le père Daniel-Ange
Dom Louis-Marie est le Père-abbé de l’abbaye Sainte-Madeleine-du-Barroux…
Vierge des chemins de France,
Vois tes fils Routiers,
Nous avons cueilli pour toi
Ces fleurs au long des bois, Ave !
Nous sommes las,
Nous pauserons auprès de Toi.
Pour la Route et pour le dur effort,
Soutiens nos pas, Maria,
Et prends-nous un jour au ciel,
Ô Mère dans tes bras.
Dans les diocèses, il est de bon ton d'organiser des rassemblements ayant pour centre de gravité des célébrations eucharistiques qui sont de moins en moins "liturgiques" et de plus en plus "spectacles". En plein air ou dans de vastes salles louées pour le "happening", autour d'un autel généralement dressé sur une scène, les célébrants font face à "leur public" : ils sourient, remuent les mains, prennent un air heureux, agitent des tissus multicolores, construisent ou font construire des trucs... parfois même se trémoussent de bonheur. Ce goût pour les messes-spectacles pose pourtant une question de fond : celle de l'authenticité de l'expérience humaine, c'est-à-dire, en définitive, celle de l'identité véritable des célébrants qui donnent l'impression d'avoir besoin de telles exhibitions pour avoir le sentiment d'exister. (Cf. Professeur Lugaresi, Osservatore Romano du 16.2.2011). En d'autres termes, peut-on être authentique, fidèle à soi-même et à sa vocation sacerdotale, lorsqu'on cède à la tentation de construire artificiellement son "profil public" ? (Cf. Benoît XVI, Message pour la Journée mondiale des Communications)
Cette question se rapporte directement à la tentation diabolique - le diable étant le "simulateur" par excellence - de fabriquer de fausses images de soi-même pour forcer les autres à se construire aussi, par mimétisme, leur fausse image en vue de la glorification ou de la destruction de soi. Quand une célébration eucharistique perd sa dimension purement liturgique pour n'être plus, par célébrants interposés, qu'une "foire aux illusions", alors ce qui se passe autour de l'autel sombre dans l'artifice : le fidèle n'est plus dans la vérité de la foi mais dans le mauvais spectacle, dans cette tendance à ne vouloir échanger que certains aspects de son monde intérieur. Quant au célébrant, il tombe dans la construction de l'image qu'il veut donner de lui : construction qui conduit inévitablement à l'auto-complaisance. Et dans sa chute, il entraîne les fidèles dont la foi est la moins assurée. Les "liturgies- spectacles" ont donc ceci de dangereux pour la foi, qu'elles se présentent comme une mise en scène ambivalente dans laquelle le vrai (un peu de liturgie) et le faux (beaucoup de spectacle) s'entremêlent au point de rendre impossible la distinction entre ce qui est juste - "orthodoxe" - et ce qui est inexact - "hétérodoxe" -. Les Pères de l'Eglise ont très tôt reconnu, dans ce bouleversement de la réalité naturelle opéré par la "fictio" du spectacle et dans la construction de pseudo-réalités visant à ne susciter que des passions ou des émotions chez les spectateurs, une signature du diable, c'est-à-dire l'action de celui qui est par définition le "mauvais imitateur" de Dieu et qui, n'ayant pas le pouvoir de créer, peut seulement corrompre ce qui vient de Dieu. En se basant sur l'enseignement de Tertullien qui parle du diable comme d'un "aemulator" et d'un "interpolator" de l'oeuvre divine, n'est-il permis de penser qu'il puisse y avoir aujourd'hui des "messes-spectacles" qui ne sont en réalité que des "imitations" de la liturgie et qui, à ce titre, pourraient être utilisées par le diable pour conduire les fidèles ailleurs que là où l'authentique liturgie de l'Eglise veut les mener ? Dans une page des "Confessions" (3, 2), S. Augustin, se souvenant combien, lorsqu'il était jeune, il fréquentait passionnément les théâtres, note avec beaucoup de finesse que les spectateurs se plaisent à souffrir en voyant se dérouler sur scène des histoires douloureuses et tragiques qui devraient susciter leur pitié s'ils les rencontraient dans la vie réelle. Et il se demande « quelle est, en définitive, la pitié que l'on éprouve en ce qui concerne les fictions théâtrales. En effet le spectateur n'est pas incité à porter secours mais seulement invité à s'apitoyer en ressentant une souffrance proportionnée a l'appréciation qu'on porte à l'acteur qui joue les scènes ». S. Augustin en conclut qu'une relation véritablement humaine ne se réalise que lorsqu'il y a responsabilité. Or le sens de la responsabilité ne peut pas s'établir dans une "messe-spectacle" où n'existe qu'une pseudo-relation entre le fidèle-spectateur séduit par un célébrant-acteur s'obligeant à jouer le rôle d'un "génial metteur en scène" (Cf. Card. Ratzinger, La célébration de la foi). Il est donc évident que les "messes-spectacles" mettent les fidèles et les célébrants en position de "fausse proximité" vis-à-vis de l'Eucharistie qu'on célèbre : elles transforment les uns et les autres en spectateurs totalement passifs et déresponsabilisés (les célébrants regardant les fidèles jouer le rôle de miroir leur renvoyant l'image qu'ils souhaitent donner d'eux-mêmes).
Le véritable engagement dans la liturgie, dans ce qu'elle signifie et apporte, ne peut donc en aucun cas se faire par le biais de ces "célébrations-spectacles" devenues à la mode. L'engagement du fidèle - sa participtio actuosa - dans le signifié de la liturgie exige continuité de l'attention, sens du concret, concentration sur ce qui est essentiel... bref, tout ce que les "célébrations-spectacles" ne permettent en aucune façon puisqu'elles sont élaborées pour n'être que de puissantes incitations à la distraction, à la dispersion du "je" qui passe sans cesse du "dedans" au "dehors" de soi (selon une dynamique psychologique bien connue de tous ceux qui naviguent sur le web, lorsqu'ils se rendent compte que, de connexion en connexion, ils ont perdu des heures précieuses.) Disons les choses sans détour : les "liturgies-spectacles" qui semblent faire les délices de certains célébrants et de certains fidèles laïcs, sont symptômatiques d'une maladie de l'esprit que les Anciens avaient diagnostiquée sous le nom de "polypragmosynè", "curiositas". Tertullien, dans son "De praescriptione haereticorum" (7, 12) indique en quoi ce mal s'oppose à la radicale nouveauté du christianisme que doit célébrer toute liturgique digne de ce nom : "Nobis curiositate opus non est post Christum Jesum nec inquisitione post evangelium." Après la rencontre avec la Bonne Nouvelle qu'est Jésus-Christ, il n'y a plus de place pour la "curiositas"... C'est dire que le fidèle baptisé ne devrait donc pas avoir besoin de prendre part à des "messes-spectacles" pour savoir qui il est, ce qu'il croit, ce qu'il célèbre dans la liturgie. Il est donc urgent de soustraire les célébrations eucharistiques du besoin d'en faire des spectacles; il est urgent de les soustraire de la théâtralisation qui procède d'une instrumentalisation du sentiment, afin de leur garantir ce style véritablement "liturgique" que Benoît XVI veut nous faire redécouvrir.
Pro Liturgia
« En ce temps-là Jésus prit la parole et dit : « Je te bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d'avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l'avoir révélé aux tout-petits. Tout m'a été remis par mon Père, et nul ne connaît le Fils si ce n'est le Père, et nul ne connaît le Père si ce n'est le Fils, et celui à qui le Fils veut bien le révéler. Venez à moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et moi je vous soulagerai. Chargez-vous de mon joug et mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez soulagement pour vos âmes. Oui, mon joug est doux et mon fardeau léger » (Matthieu 11, 25-30).
Il ne fait aucun doute que la voie choisie par le Seigneur pour se révéler à nous, pour nous manifester l’amour infini du Père, passe par la « petitesse », c’est-à-dire l’humilité et la simplicité. Ce sont précisément les petits, ceux « qui ont l’esprit de pauvreté », qui sont les destinataires de Son annonce de salut : « Bienheureux ceux qui ont l’esprit de pauvreté parce que le Royaume des Cieux est à eux » (Matthieu 5, 3). Cette voie de la petitesse évangélique a trouvé les Apôtres eux-mêmes non préparés, ainsi que les contemporains de Jésus. Ils ne pouvaient imaginer que le Seigneur Très-Haut s’abaisse d’une manière invraisemblable, en prenant la nature, « la condition d’esclave » (Philippines 2, 7), et en partageant en tout notre condition, à l’exception du péché. Comme Sait Paul l’a bien compris, « Dieu a choisi ce qui dans le monde est fou pour confondre les sages, Dieu a choisi ce qui est faible dans le monde pour confondre les forts » (1 Corinthiens, 1, 27). Dans la petitesse et dans la simplicité, le regard se détache de ce qui semble grandiose, étonnant, fort et puissant, et se tourne vers ce qui se présente comme pauvre et humble, simple et doux. Dans la succession quotidienne de notre existence humaine, si nous voulons être parmi ceux qui sont capables d’accueillir le Royaume de Dieu, parmi ceux qui apprennent auprès de Jésus, nous devons alors adopter une pensée, un style de vie, un comportement, qui soient conformes à la petitesse selon l’Evangile, autrement, nous resterons ‘’en dehors’’ : « Si vous ne convertissez pas et ne devenez pas comme de petits enfants, vous n’entrerez pas dans le Royaume des Cieux » (Matthieu 18, 3). Jésus a refusé en effet les voies de la grandeur et du pouvoir humain, et a choisi, pour lui et pour les siens, les voies de la petitesse et du service : « Vous savez que les chefs des nations dominent sur elles en maîtres et que les grands leur font sentir leur pouvoir. Il n'en doit pas être ainsi parmi vous : au contraire, celui qui voudra devenir grand parmi vous, sera votre serviteur, et celui qui voudra être le premier d'entre vous, sera votre esclave. C'est ainsi que le Fils de l'homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude » (Matthieu 20, 25-28). Le titre de « Serviteur » exprime tout cela, et si le Maître s’est fait Serviteur, combien plus encore ses disciples devront suivre son exemple et être des serviteurs ! Ils sont, dans la logique du Royaume, les « serviteurs inutiles » (cf. Luc 17, 10). Nous faire ainsi petits, pour suivre Jésus Enfant et Jésus Crucifié, nous élèvera à la gloire du Ressuscité. Seul celui qui « s’humilie », nous assure l’Evangile, sera « élevé » (cf. Marc 10, 31). Ainsi la voie de la petitesse nous éduque à ne pas vivre en fonction de la terre mais à faire de notre vie une escalade vers le Ciel. Jour après jour, nous sommes appelés à monter de nombreuses petites marches, l’une après l’autre, par de petits actes d’amour répétés envers le Seigneur et envers le prochain, qui nous le représente. Le véritable disciple du Christ doit monter les gradins de l’humilité, et c’est seulement ainsi qu’il ne sera pas entraîné par l’esprit contraire. Jésus est clair, comme toujours, même sur ce point : « Eh bien ! Moi je vous dis de ne pas tenir tête au méchant : au contraire, quelqu'un te donne-t-il un soufflet sur la joue droite, tends-lui encore l'autre ; veut-il te faire un procès et prendre ta tunique, laisse-lui même ton manteau ; te requiert-il pour une course d'un mille, fais-en deux avec lui. A qui te demande, donne ; à qui veut t'emprunter, ne tourne pas le dos. Vous avez entendu qu'il a été dit : ‘Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi’. Eh bien ! Moi je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs, afin de devenir fils de votre Père qui est aux cieux, car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes » (Matthieu 5, 39-45).
En regardant la Sainte Vierge, l’Eglise contemple la correspondance parfaite de la créature aux désirs du Créateur, la ressemblance parfaite de la Mère avec son Fils. Tout en Elle nous parle de Lui : chaque geste, chaque pensée, chaque parole de la Mère révèlent le Fils. Les lieux des apparitions mariales, comme Lourdes, sont imprégnés eux aussi de l’Esprit de Jésus, ils sont remplis de Sa Présence Eucharistique et de Son Pardon Sacramentel. Vraiment, là où se trouve la Mère, se trouve aussi le Fils, et vice versa. Comme l’a déclaré le Pape Benoît XVI : « Marie et Jésus vont de pair. A travers Elle, nous voulons continuer à dialoguer avec le Seigneur, en apprenant ainsi à mieux le recevoir. Sainte Mère de Dieu, prie pour nous, comme à Cana, tu as prié pour les époux! Guide-nous vers Jésus - toujours à nouveau! Amen!” (11 septembre 2006: Messe sur la Place du Sanctuaire d'Altötting).
L’Encyclique « Ecclesia de Eucharistia », au numéro 57, parle de la vérité de la présence de la Vierge Marie à chaque Messe ; c’est une vérité qui réjouit le cœur et éclaire l’esprit de chaque prêtre et de chaque fidèle, qui reconnaît dans la Mère de Jésus sa propre Mère qui lui a été confiée personnellement par le Seigneur lui-même, à l’heure solennelle de son Sacrifice Ultime (cf. Jean 19, 25-27). Le Serviteur de Dieu Jean Paul II nous fait entrer de manière très vivante, dans le lien étroit entre l’Eucharistie et Marie ; un « binôme », lui aussi « inséparable » comme le lien entre l’Eucharistie et l’Eglise : « Dans le ‘’mémorial’’ du Calvaire est présent tout ce que le Christ a accompli dans sa passion et dans sa mort. C'est pourquoi ce que le Christ a accompli envers sa Mère, il l'accomplit aussi en notre faveur. Il lui a en effet confié le disciple bien-aimé et, en ce disciple, il lui confie également chacun de nous : « Voici ton fils ! ». De même, il dit aussi à chacun de nous: « Voici ta mère ! » (cf. Jean 19, 26-27).
« Vivre dans l'Eucharistie le mémorial de la mort du Christ suppose aussi de recevoir continuellement ce don. Cela signifie prendre chez nous - à l'exemple de Jean - celle qui chaque fois nous est donnée comme Mère. Cela signifie en même temps nous engager à nous conformer au Christ, en nous mettant à l'école de sa Mère et en nous laissant accompagner par elle. Marie est présente, avec l'Église et comme Mère de l'Église, en chacune de nos Célébrations Eucharistiques. Si Église et Eucharistie constituent un binôme inséparable, il faut en dire autant du binôme Marie et Eucharistie. C'est pourquoi aussi la mémoire de Marie dans la Célébration eucharistique se fait de manière unanime, depuis l'antiquité, dans les Églises d'Orient et d'Occident » (Jean Paul II, « Ecclesia de Eucharistia », n. 57). Cette vérité, toutefois, n’appartient pas simplement à la dévotion privée des fidèles plus sensibles à la piété mariale, mais fait partie du Magistère le plus élevé de l’Eglise qui, par la voix des Souverains Pontifes, éclaire le chemin du Peuple de Dieu. Comme il est consolant de savoir que, précisément dans le mémorial eucharistique, avec le don du Corps et du Sang du Christ, le Seigneur nous renouvelle aussi le don de la maternité de sa Mère ! Comme à Jean, le Seigneur Eucharistique répète à chacun de nous ces paroles émouvantes « Voilà ta Mère » (Jean 19, 27). Il n’y a pas de moment plus solennel, plus important et plus significatif que celui-ci, pour pouvoir les réentendre avec foi au plus profond de notre âme, et les recevoir comme don d’amour, comme Jean les a reçues lui qui « à partir de ce moment a pris Marie dans sa maison » (cf Jean 19, 27), dans ce qu’il avait de plus précieux. Plus nous entrons dans le mystère eucharistique du Christ, plus nous découvrons le don de la maternité universelle de la Vierge, qui nous apprend à son tour à faire nôtres les intentions du Cœur du Fils, et à « mieux Le recevoir », comme l’a déclaré au Sanctuaire Marial de Altötting, le Pape Benoît XVI dans son homélie du 11 septembre dernier : « L'adoration du Seigneur dans l'Eucharistie a trouvé à Altötting, dans l'antique salle du trésor, un lieu nouveau. Marie et Jésus vont de pair. A travers Elle, nous voulons continuer à dialoguer avec le Seigneur, en apprenant ainsi à mieux le recevoir ».
Quelle valeur théologique et spirituelle profonde prend ainsi, à cette lumière, le Rosaire lui-même récité devant le Saint-Sacrement ! Et que dire de l’amour envers l’Eucharistie qui jaillit de la spiritualité du Rosaire ! En croyant vraiment que « Marie et Jésus vont de pair », nous ne serons pas surpris d’être convaincus dans notre cœur que là où il y a Jésus, il y a toujours aussi sa Mère, non certes comme présence envahissante, mais comme présence maternelle, remplie de tendresse et de sollicitude qui nous confie tous à l’Amour de Dieu, et nous jette dans ses bras.